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    Photo de la victime décapitée en Isère: un policier avoue en être l'auteur

    Un cliché censé représenter la scène macabre du meurtre d'Hervé Cornara circule sur le web. Jeudi, la presse a révélé que le photo a été prise et diffusée par un policier stagiaire.

    Entendu dans le cadre de l'enquête ouverte suite à la mise en ligne d'une photo de la tête du chef d'entreprise Hervé Cornara, assassiné par Yassin Salhi le 26 juin dernier, un officier stagiaire a avoué être à l'origine de cette diffusion, a révélé Le Dauphiné libéré ce jeudi. L'information a été confirmée par le parquet de Vienne, rapporte l'AFP.

    «Les qualifications pénales et les modalités des poursuites sont en cours de définition», a souligné le procureur, qui n'a donc pas encore décidé des suites judiciaires à donner.

    Hervé Cornara, un chef d'entreprise qui habitait à Fontaines-sur-Saône, est mort vendredi 25 juin.

    L'un de ses employés, Yassin Salhi, a reconnu l'avoir assassiné puis décapité avant d'attaquer l'usine Air Products de Saint-Quentin-Fallavier. La tête de la victime a été retrouvée sur le site de l'usine, accrochée à un grillage.

    L'enquête doit notamment déterminer si ce meurtre est uniquement lié au lien de subordination entre les deux hommes ou s'il est de nature terroriste.

    Quelques heures après, une photo présentée comme étant celle de la tête de la victime a commencé à circuler sur les réseaux sociaux. L'auteur du cliché n'est pas précisé par ceux qui le diffusent.

    Sur ce cliché, on aperçoit au premier plan une tête décapitée, accrochée à un grillage et entourée de deux drapeaux. On aperçoit derrière une bâche noire, comme celle qui a été déployée à Saint-Quentin-Fallavier après l'attaque là où la tête de la victime a été retrouvée, ainsi qu'un policier en uniforme.

    Si la photo est authentique, elle semble avoir été prise à l'intérieur de l'enceinte de l'usine, au vu des photos de presse prises de l'extérieur.

    Voici l'image qui circule en ligne (nous avons choisi de masquer le défunt par respect pour lui et sa famille).

    Et voilà une des photos prises de l'autre côté par des photographes professionnels:

    Des centaines de tweets ainsi que des sites, souvent proches de l'extrême droite, ont diffusé le cliché en ligne.

    L'association islamophobe Riposte Laïque l'a ainsi publié dans sa version «originale» non floutée, accompagné d'une virulente diatribe contre le «fumier de l'immigration tous azimuts».

    D'où sort cette photo? Est-elle authentique?

    Contacté par BuzzFeed France, le ministère de l'Intérieur ne souhaite faire «aucun commentaire» sur le cliché. De leur côté, la police nationale et le parquet de Paris n'ont pas donné suite à nos sollicitations.

    Nous avons sollicité l'avis d'un photographe spécialisé dans le photomontage (il ne souhaite pas voir son nom associé à cette photo macabre). Il nous explique qu'il n'a pas repéré de traces de retouches évidentes sur le cliché, même si c'est «difficile à dire à cause de la mauvaise définition de la photo».

    Partager ce cliché sans masquer le visage du défunt n'est en tout cas pas sans risque aux yeux de la loi, nous explique Mareva Desbois, avocate spécialisée notamment en droit à l'image et droit de la presse:

    «Le droit à l'image d'une personne décédée est controversé en jurisprudence. La question se pose plutôt en termes de dignité. Les proches de la victime pourraient très bien engager une procédure au nom de la dignité du défunt, mais c'est là aussi controversé, ou bien au nom de leur propre dignité et du respect de leur deuil.»

    Si elle est identifiée, la personne qui a pris cette photo s'exposerait évidemment également à des poursuites, à cause du secret de l'enquête (si l'auteur de la photo est un représentant des forces de l'ordre sur place, la question du respect du secret professionnel se poserait, et il s'exposerait en plus à des sanctions administratives). Dans tous les cas, le droit à l'information existe aussi, et serait opposé par la défense.

    L'avocat Richard Malka, interrogé par RTL, est quant à lui plus catégorique: «Il ne fait à peu près aucun doute que cette diffusion est condamnable sur le motif de l'atteinte à la dignité humaine qui en l'espèce est colossale», affirme-t-il.

    Sollicité par BuzzFeed France, Twitter n'a pas souhaité commenter la propagation de ce cliché sur sa plateforme. Ce jeudi, près d'une semaine après la mort d'Hervé Cornara, des dizaines de tweets avec cette photo restent visibles (d'autres ont disparu).

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