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    13 novembre 2015, 21h20: quand nos téléphones ont commencé à vibrer

    Le soir du 13 novembre 2015, nous avons tous reçu des textos, des messages privés sur Facebook, Whatsapp ou Twitter. Vous avez bien voulu les partager avec nous.

    13 novembre 2015, aux alentours de 21h20. Une première explosion retentit aux abords du Stade de France. Quelques minutes plus tard le 10e arrondissement de Paris est secoué par une fusillade à l'angle des rues Bichat et Alibert. S'en suivra une nuit de peur pour tous ceux qui, ce soir-là, ont eu à s'inquiéter du sort d'un proche. Une nuit ponctuée de messages, tantôt inquiétants, tantôt rassurants. De questions, d'incompréhensions, mais aussi, parfois, d'appels à l'aide. Ce sont ces messages, les vôtres et les nôtres, que nous avons réunis, un an après.

    «Elle se cache dans les toilettes»

    «On n’a pas échangé davantage à ce moment-là, ma batterie s’est vidée au même moment. Du coup l’échange en est resté là. Mais notre amie a survécu.»

    «Mon Dieu Clara»

    «J’habite rue Saint-Maur au croisement de la rue Fontaine au Roi mais j’étais ce soir-là à La Cigale pour le festival des Inrocks. Elle habite rue Marie et Louise, sur rue, elle était donc aux premières loges...»

    «Je suis à côté des fusillades»

    «Je fais partie d’une troupe de cabaret amateur, on devait jouer notre spectacle le 14 novembre 2015. Le soir des attentats on était toutes dispersées dans Paris pour terminer les derniers préparatifs du spectacle. On était une dizaine de membres. Personnellement j’étais à côté du Bataclan donc je me suis retrouvée mise en sécurité dans un bar, rideau baissé sans contact avec personne. Notre seul moyen d’organiser la soirée, c’était de s’envoyer des messages via un groupe privé Facebook. on s’est retrouvées là pour pouvoir se tenir au courant de où était chacune et comment allait se passer la suite. Nos familles venues de province se retrouvaient aussi coincées à Paris.»

    «À quelle heure vous êtes sortis du stade?»

    «Est-ce que tout le monde va bien?»

    «Trois d'entre nous étions juste à côté du Bataclan, les autres étaient soit chez eux, soit en vacances en Bretagne ou au Danemark. On s'est tout de suite mis en mode "journalistes": David a essayé de se rapprocher de la scène, on a démarré un live sur le site, j'ai emprunté l'ordi d'un pote après m'être réfugiée chez lui, et on a commencé à couvrir l'événement. Marie nous a aidés depuis les États-Unis et on a travaillé toute la nuit. C'était la première fois que la rédac' couvrait un événement comme celui-ci. Le lendemain presque tout le monde pleurait à la rédac' mais on a bossé comme des fous. Même Piekhe qui était pigiste pour nous à l'époque est venu prêter main forte, et on ne s'est vraiment arrêtés que plusieurs jours plus tard.»

    «Tout va bien? Y a eu une fusillade près de chez vous»

    «Tu es sur Paris??»

    «Après avoir assisté au concert, on n'est pas ressortis par l'entrée principale mais par les issues de secours. J'ai pensé que c'était normal au vu de l'affluence. On sort et on se dit qu'on va faire le tour pour entrer à nouveau par l'entrée principale et là: grilles fermées. On se les pèle à mort et on entend quelques personnes parler de tirs, mais comme on court pour rebrousser chemin, on n'y fait pas trop attention. C'est une fois dans la salle qu'on sort nos téléphones que j'envoie une photo de là où je suis à des amis. On m'avertit que "fais gaffe ça tire de partout à Paris à l'arme lourde, prise d'otage au Bataclan t'es où????"»

    «Je viens d'apprendre la nouvelle, tu vas bien?»

    «J'ai passé toute la journée à Paris le 13 mais j'ai décidé de rentrer chez moi plus tôt que d'habitude et donc je n'étais pas à Paris quand les attentats ont commencé. La chose la plus étonnante pour mes amis et ma famille, c'est que le lendemain des attentats les Français étaient "en terrasse". Ils ont été très émus par la solidarité. Moi aussi j'ai été très émue par tous les gens qui s'inquiétaient pour moi. Là, ce sont des messages d'une amie, Fiona, et de ma tante Jackie

    «Tu as des proches qui vivent là-bas?»

    «Mathijs est un ami que j'ai rencontré en juillet 2015. Il est Hollandais et il a pris de mes nouvelles. Je ne vis pas à Paris mais je suppose qu'il n'était pas au courant.»

    «Il est où le gilet par balles?»

    «Le vendredi 13 novembre 2015, j’étais en vacances en Bretagne, au restaurant pour un dîner romantique avec mon amoureux. J’avais débranché mes alertes, fait exprès de ne pas regarder mon portable pour décrocher du travail, et quand je l’ai pris en rentrant, mon écran affichait deux messages incompréhensibles: "Everything OK?", de la part de Jason, qui gère la sécurité de BuzzFeed, et surtout ce texto de David: "Salut, si jamais t'as deux minutes il est où le gilet par balles?" Un truc complètement surréaliste quand tu es en vacances. Je n’oublierai jamais ce "si jamais t’as deux minutes", comme si se demander où était le gilet par balles était anecdotique et que je ne devais pas m’inquiéter! J’ai appelé toute l’équipe, qui avait déjà commencé à se parler par Whatsapp, sorti mon ordinateur, et me suis mise en mode "journaliste". On est rentrés en avance de nos vacances, j’ai bossé dans la voiture, j’ai bossé tout le week-end. Je pense que je n’ai réalisé ce qui s’était passé que le lundi, quand j’ai eu un mouvement d’arrêt avant de prendre le métro pour aller au travail.»

    «C'est un cauchemar»

    «J'étais moi-même chez mes parents, dans les Yvelines, le soir du 13 novembre. Ma soeur vit en Côte d'Ivoire, et je savais qu'avec le décalage horaire, elle n'avait pas été avertie de ce qui se passait à Paris et Saint-Denis. Je l'ai donc prévenue par Whatsapp. Quand elle a allumé sa télé, le match France-Allemagne se terminait. On croyait encore à ce moment-là que les explosions entendues aux abords du stade étaient dues à des grenades.»

    * Les prénoms ont été modifiés à la demande des témoins.

    ** Les messages floutés dans certaines discussions contenaient des informations personnelles.