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    Cet homme explique parfaitement pourquoi il n’a pas «choisi» d’être gay

    «Moi, personnellement, j'ai choisi l'homosexualité à cause de Priscilla, Queen of the desert: je rêvais de traverser le Berry au sommet d'un escarpin à talon en paillettes.»

    Kévin Chausson, 25 ans, est étudiant à Sciences Po-Paris et assistant de justice au Conseil d'État.

    Le 13 juin, cet originaire de Vierzon a posté sur son profil Facebook un texte –ironique– où il explique qu'il a «choisi» d'être gay.

    «Moi, personnellement, j'ai choisi l'homosexualité à cause de Priscilla, Queen of the desert: je rêvais de traverser le Berry au sommet d'un escarpin à talon en paillettes», plaisante-t-il. Avant de poursuivre:

    «Bon, je ne vous cache pas que j'ai hésité à abandonner l'homosexualité pour choisir l'hétérosexualité quand j'ai vu que je risquais la peine de mort dans 10 pays, la prison dans 72 autres avec parfois le fouet en cadeau (et franchement, risquer de me retrouver au bout d'une corde ou sous une pluie de pierres pendant mon voyage en Mauritanie, ça ne sonnait pas très cool).

    Et puis, "sale pédé", "enculé de merde", ou encore "pauvre tapette" dans la cour de récré, ça m'a fait réfléchir aussi. Je me suis quand même demandé pourquoi choisir la voie de l'homosexualité quand j'ai découvert qu'un-e jeune LGBTQI avait 13 fois plus de risque de faire une tentative de suicide qu'un-e jeune hétéro.

    Ah oui, des millions de personnes hurlant dans les rues que je devrais être mis au bûcher, que je suis contre-nature, ou disant sur les plateaux télé que je ne dois pas avoir de droits parce que je suis une abomination, ça m'a aussi fait douter de mon choix.

    Mais quand même, je me suis rappelé que si je choisissais l'option "gay" plutôt qu'"hétéro", j'aurais plein de beaux mecs, parce que "tous les mecs mignons sont gays", et que, franchement, je serais "cute avec mon mec", en plus on pourrait échanger nos fringues, et j'aurais tellement de goût pour la mode et la déco. Du coup, après toutes ces hésitations, j'ai bien réfléchi, et j'ai enfin choisi mon orientation. J'ai décidé que quand je serai grand, je serai homosexuel!

    Et vous, quand est-ce que vous avez choisi d'être hétéro? (ou de ne pas l'être, petit-e-s tordu-e-s)

    PS: grande nouvelle, je n'ai pas choisi d'être homo; mais j'ai choisi de vivre ma vie, d'assumer dans une société qui ne jure que par la norme, et de me battre tant que ce serait nécessaire.»

    Contacté par BuzzFeed News, Kévin Chausson explique qu’il a eu l’idée de ce texte quand il a découvert, un peu plus tôt dans la journée, le tweet de François Hollande sur les attentats d’Orlando qui parlait de la «liberté de choisir son orientation sexuelle».

    Le tweet, très critiqué, a été effacé 20 minutes après avoir été posté.

    Hollande parle de « liberté de choisir son orientation sexuelle ». On lui explique ?

    «Je me suis demandé comment on pouvait encore, fût-ce par maladresse, écrire que l'homosexualité était un choix de vie, alors même que personne ne pense qu'on choisit d'être hétéro», raconte Kévin Chausson.

    «J'ai pris le parti de faire réfléchir tout en gardant le sourire, et en soulignant la bêtise de ce tweet.»

    Il indique avoir voulu «montrer la bêtise» de l'expression ''choisir son orientation sexuelle" mais aussi rappeler des faits que certains ont tendance à oublier.

    «J'ai simplement voulu rappeler que l'homosexualité, c'est aussi l'homophobie au quotidien, le risque de se faire casser la gueule parce qu'on embrasse son mec ou sa copine dans la rue, d'être mis-e à mort dans une dizaine de pays ou emprisonné-e dans quelques autres.

    Par contre, je trouvais important de dire qu'une fois qu'on s'est accepté, on choisit d'assumer ou pas. On choisit de vivre sa vie ou pas. Ce n'est pas toujours possible, pas partout, mais on doit se battre pour que ça le devienne.»

    Son texte a été partagé plus de 1800 fois, et a reçu plus de 4800 réactions sur Facebook.

    «À la base, c'était juste une petite plaisanterie pour faire rire les ami-e-s, alors qu'on avait toutes et tous reçu une sacré gifle en apprenant le massacre», détaille-t-il. «Je me suis dit que la plupart de mes contacts comprendraient de quoi je parle, que ça leur parlerait, les ferait sourire.»

    Kévin Chausson dit n’avoir eu «que des retours positifs», «beaucoup de "merci", et pas mal de "félicitations, vis ta vie et sois heureux"».