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    Baylet accusé de violences: la procureure met à mal la défense du ministre

    Info BuzzFeed - Le parquet de Montauban confirme à BuzzFeed News qu'il n'y a pas eu d'instruction judiciaire dans l'affaire dans laquelle le ministre est accusé de violences, contrairement à ce que ce dernier avait affirmé pour se défendre.

    En mars dernier, nous révélions que l'actuel ministre de l’Aménagement du territoire avait été accusé de violences en 2002 par sa collaboratrice de l'époque, alors qu'il était sénateur, et que la plainte avait été soldée par une transaction secrète. L'affaire avait été classée sans suite.

    Le 11 octobre dernier, la députée Isabelle Attard a interrogé le ministre à l'Assemblée nationale pour lui demander de s'expliquer sur ces anciennes accusations. Le ministre s'était alors défendu en disant:

    «On peut tout romancer mais il y a eu une instruction judiciaire dans cette affaire et elle a été classée sans suite, ce qui, vous l’imaginez, prouve que les choses ne se sont pas passées comme vous le racontez, parce que le procureur de la République n’aurait jamais classé sans suite si les choses étaient telles que vous le dites.»

    Mais selon le témoignage d'un des enquêteurs de l'époque, retrouvé par BuzzFeed News, il «est faux» de dire qu'il y a eu une enquête judiciaire. Mi-octobre, celui-ci nous racontait:

    «Cela aurait signifié la saisine d’un juge d’instruction (indépendant, ndlr). Cela n’a pas été le cas puisque l’enquête semble être restée au stade du parquet de Montauban.»

    Aujourd'hui, c'est la procureure actuelle de la République de Montauban, Alix-Marie Cabot-Chaumeton, qui met à mal la défense du ministre. Contactée par BuzzFeed News, cette dernière s'exprime pour la première fois sur cette affaire. Elle nous confirme qu'il n'y a «pas eu d'information judiciaire» et que l'enquête était restée au stade du parquet.

    Les étonnants arguments de la procureure

    Quand nous l'avions contactée mi-octobre, après l'interpellation de Jean-Michel Baylet par Isabelle Attard à l'Assemblée, la procureure nous avait répondu qu'elle devait d'abord retrouver le dossier de l'affaire. Si, aujourd'hui, elle explique avoir pu consulter le dossier, elle refuse toutefois de donner toutes autres informations sur l'enquête et les raisons pour lesquelles l'affaire a été classée.

    «Je n'entends pas communiquer sur cette affaire qui est ancienne et qui est couverte par la prescription», argumente-t-elle. La procureure refuse de donner la date à laquelle l'affaire a été classée. Pour justifier son refus de parler à la presse, elle met en avant la loi d'amnistie du 6 août 2002.

    Si l'on suit le raisonnement de la procureure, cela signifie donc qu'elle considère que les infractions ont bien été commises par le ministre... car seules les infractions sont amnistiées. Une contradiction qu'elle finit d'ailleurs elle-même par admettre:

    «On peut évoquer les faits, mais on ne peux pas évoquer de condamnation» avant de se reprendre et de préciser «qui n'a pas eu lieu d'ailleurs.»

    «Il m’a porté des coups essentiellement au visage»

    En 2002, Jean-Michel Baylet est sénateur du Tarn-et-Garonne quand son assistante parlementaire de l'époque, Bernadette Bergon, porte plainte contre lui le 11 février. Les faits se seraient déroulés dans la soirée du samedi 9 février, dans la maison de Valence d’Agen de Jean-Michel Baylet. Lors d’une audition datée du 15 février 2002, dans le cadre de l’enquête préliminaire, celle-ci raconte:

    «Il m’a porté des coups essentiellement au visage.»

    Elle précise que l'actuel ministre de l’Aménagement du territoire lui aurait ensuite demandé de quitter les lieux, alors qu’elle était «entièrement dévêtue et pieds nus».

    Un des gendarmes de l'époque, attaché à la section de recherche de Toulouse, se souvient avoir auditionné Bernadette Bergon. Il témoigne:

    «Elle avait un visage tuméfié, elle était très marquée. Les pommettes gonflées, les yeux gonflés. Il y avait des hématomes: c’était bleu, gonflé. Elle avait le visage bouffi, traumatisé. Il était facile de constater que c’était des coups qui étaient à l’origine de ces marques.»

    Il se souvient également avoir auditionné Jean-Michel Baylet. Mais «la procédure, pour nous, s’est arrêtée là, explique-t-il. Sur instruction du procureur de la République, il n’y a pas eu d’autres actes.» Pourquoi? Le parquet de Montauban se refuse pour l'instant à le dire.

    En attendant, le gouvernement a repris la défense du ministre sans vouloir commenter les faits. Vendredi 28 octobre, les avocats de Jean-Michel Baylet ont annoncé que ce dernier a porté plainte en diffamation, notamment contre la députée écologiste Isabelle Attard. La plainte vise la lettre ouverte publiée le 20 octobre qui appelle à la démission du gouvernement de Jean-Michel Baylet. Après nos révélations en mars dernier, le ministre n’avait pourtant ni contesté les faits qui lui sont reprochés, ni porté plainte en diffamation contre BuzzFeed News.

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