Aller directement au contenu

    Si vous avez moins de 20 ans et que vous ne savez pas qui est Simone Veil, pas de panique

    Simone Veil, militante féministe, ancienne ministre, s'est éteinte en 2017. Elle sera la cinquième femme de l'histoire à faire son entrée au Panthéon dimanche 1er juillet. Si les femmes ont le droit d'avorter librement en France, c'est grâce à elle.

    Elle est le symbole de la lutte des femmes pour le droit à disposer librement de leur corps. Simone Veil, décédée en juin 2017 à l'âge de 89 ans, fera son entrée au Panthéon dimanche 1er juillet.

    Elle devient ainsi la cinquième femme inhumée là-bas aux côtés de Sophie Berthelot, Marie Curie, Germaine Tillion et Geneviève de Gaulle-Anthonioz.

    Si vous avez moins de 20 ans, vous ne savez peut-être pas qui était Simone Veil. Pas de panique, on vous explique.

    Une combattante acharnée pour l'IVG

    Après des études de droit, Simone Veil se lance en politique et intègre en 1974 le gouvernement de Valéry Giscard d'Estaing. Elle devient ministre de la Santé et a pour mission de présenter au Parlement un projet de loi sur l'interruption volontaire de grossesse. Une révolution dans une société encore très conservatrice.

    Voir cette vidéo sur YouTube

    youtube.com

    À l'Assemblée nationale, les débats sont houleux, parfois violents. En première ligne, c'est Simone Veil qui est la cible des pires attaques. Sur les bancs de l'hémicycle, les insultes fusent. Certains, comme Hector Rolland, député de l'Allier, accusent la ministre de «faire le choix du génocide». Jacques Médecin, député-maire de Nice, compare la légalisation de l'IVG à la «barbarie organisée et couverte par la loi comme elle le fut par les nazis». Jean Foyer accuse: «Le temps n'est pas loin où nous connaîtrons en France ces avortoirs, ces abattoirs où s'entassent des cadavres de petits hommes.»

    Le député-maire de Nice compare la légalisation de l'IVG à la «barbarie organisée et couverte par la loi comme elle le fut par les nazis»

    Simone Veil encaisse, et après trois jours et deux nuits de débats à couteaux tirés, la loi est adoptée par l'Assemblée nationale. Elle dira plus tard, «ça n'était pas un hémicycle, c'était une arène».

    Le 17 janvier 1975, la loi entre en vigueur, et l'IVG est officiellement légalisé en France. Une révolution. Mais si les débats ont été aussi durs, et aussi violents pour Simone Veil, c'est aussi à cause de son passé. «Sur le plan personnel, certains moments des débats parlementaires ont été difficiles» dira la ministre. Et pour cause: des députés n'hésitent pas à l'accuser d'imiter les nazis, alors qu'elle est une rescapée des camps. Simone Veil porte à son bras un tatouage indélébile: le numéro que les nazis lui ont attribué lors de sa déportation.

    Simone Veil, une survivante

    Simone Veil naît le 13 juillet 1927 à Nice, et s'appelle alors Simone Jacob. Elle a deux sœurs et un frère, tous plus âgés qu'elle. La famille, juive non pratiquante, subit de plein fouet les lois anti-juives imposées par le régime de Vichy, et le 30 mars 1944, Simone, qui se fait appeler Jacquier pour échapper aux persécutions, est arrêtée à Nice, ainsi que toute sa famille. Ils sont tous déportés dans différents camps de concentration. Les parents et le frère de Simone Veil ne reviendront jamais des camps. En rentrant d'Auschwitz-Birkenau, Simone Veil témoignera de la difficulté de raconter la déportation à ceux qui ne l'ont pas vécue:

    «On entend souvent dire que les déportés ont voulu oublier et ont préféré se taire. (...) Si je prends mon cas, j'ai toujours été disposée à en parler, à témoigner. Mais personne n'avait envie de nous entendre.»

    Dans un livre, Une vie, elle se livrera au récit de ces mois passés dans l'enfer des camps. Elle écrit:

    «Nous ne pouvions pas comprendre. Ce qui était en train de se produire à des dizaines de mètres de nous était si inimaginable que notre esprit était incapable de l’admettre.»

    Sur le bras, les nazis lui tatouent cinq chiffres: 78651. Un numéro qu'elle fera graver, bien des années plus tard, sur son épée d'académicienne. Elle est en effet élue à l'Académie française en 2008, alors que s'achève sa carrière politique après neuf ans passés à siéger au Conseil constitutionnel.

    Une polémique, et le retrait de la vie publique

    En 2013, à l'étonnement général, Simone Veil est photographiée au milieu des manifestants de La Manif pour tous, qui défilent contre l'ouverture du mariage aux couples de même sexe. Difficile de dire si l'ancienne ministre à la santé déjà fragile à cette époque savait exactement avec qui elle défilait à ce moment-là, mais son entourage assurera plus tard que cette présence dans le cortège «exprimait les réserves de Simone Veil à l'égard de l'ouverture du droit à l'adoption des couples homosexuels».

    C'était l'une des toutes dernières apparitions publiques de Simone Veil. Hospitalisée en 2016 pour des problèmes respiratoires, l'icône des droits des femmes est finalement morte au matin du 30 juin 2017 à Paris.

    En 2008, c'est Jean d'Ormesson qui accueille Simone Veil à l'Académie française. Au cours de son discours, il rappelle l'incroyable parcours de la nouvelle académicienne et lance:

    «Vous incarnez avec plus d’éclat que personne les temps où nous avons vécu, où le Mal s’est déchaîné comme peut-être jamais tout au long de l’histoire et où quelques-uns, comme vous, ont lutté contre lui avec détermination et courage et illustré les principes, qui ne nous sont pas tout à fait étrangers, de liberté, d’égalité et de fraternité.»