Aller directement au contenu

    Le témoignage angoissant d'un couple dans le métro le soir du 1er mai

    «Autour de nous, il y avait dix, quinze personnes qui vomissaient ou qui avaient les yeux en sang.»

    Le soir du 1er mai, Sylvie Aebischer et Fabien Marcot se rendent à un dîner dans Paris. À l'aller et au retour, ils sont confrontés à des scènes peu banales en marge des manifestations de la Fête du travail et de Nuit Debout.

    Métro à Maraîcher, direction un dîner chez une copine entre Gare de Lyon et quai de la râpée. Bref on prend la 9 et on change à Nation

    Le premier incident auquel ils ont assisté était à la station de métro Nation, vers 19 heures, dans l'est de Paris. «Dans les couloirs de Nation, il y avait des familles avec des poussettes. On sent une odeur diffuse de gaz lacrymogène», explique Fabien à BuzzFeed News. Sylvie, sa compagne, raconte sur Twitter comment elle a vécu la scène.

    Au moment de s'engouffrer dans les escaliers on voit des gens qui hésitent à avancer puis reculent. Un danger ? Des casseurs ?

    Non, juste un CRS accroupi en haut des escaliers, flashball à l'épaule tenant en joue l'escalier. JUSTE un CRS, normal quoi...

    Sylvie décrit une situation tendue, les CRS étant postés à différents endroits de la station. «À différents croisements, on est tombés sur des CRS avec des flash-balls», explique Fabien.

    Là tu sens un peu la panique chez les gens qui prennent leur correspondance. Il se passe quoi ? C'est la guerre civile ? On peut passer ?

    Apparemment oui, si on prend pas l'escalier mais l'escalator. On peut donc passer à côté d'un CRS qui vise les gens qui sortent du quai.

    Sauf que tout le monde n'ose pas. Devant moi trois jeunes hommes noirs qui sortaient du métro. Qui voient le flashball et reculent.

    Eux ne prendront pas l'escalator comme si l'habitude du racisme d'Etat les rendaient plus méfiants. Ils ont préféré faire demi tour.

    D'après Fabien, quatre ou cinq personnes d'origine maghrébine ont été contrôlées par un groupe de CRS.

    En haut il y avait un barrage de CRS qui contrôlait des gens. Qui ils avaient arrêté ? Que des arabes... Quitte à faire la peau aux casseurs

    Plus loin, encore des CRS qui bloque l'accès à un couloir, on ne saura pas pourquoi. On nous fait signe de dégager, trouver un autre accès

    Sur Twitter, Fabien raconte aussi la mésaventure qui leur est arrivée au retour de leur dîner, quelques heures plus tard, aux alentours de 23 heures.

    Sans se douter qu'au retour on allait tomber sur pire encore métro Jacques Bonsergent... Mais là je laisse @fabienmarcot raconter...

    Sur la ligne 5, on devait changer à République. Sans prévenir le métro ne s'y arrête pas et va direct à l'arrêt suivant : Jacques Bonsergent

    «Des gens nous ont expliqué qu'ils ont été chassés vers l'intérieur de la bouche de métro», relate Fabien à BuzzFeed News. Il estime qu'il y avait une quarantaine de personnes à l'intérieur de la station.

    Avec d'autres passagers, on descend de la rame qui repart. Soudain, des dizaines de gens courent vers nous en dévalant les escaliers.

    Viday Sparks, un autre témoin sur Twitter, a filmé une courte vidéo de la scène vue de la bouche de métro Jacques Bonsergent.

    > finalement ils arrivent à nous repousser en bas des escaliers, puis ceci arrive :

    Rapidement, la gorge, les yeux nous brulent. Lacrymo. Impossible de nous approcher des escaliers pour sortir tant l'air est irrespirable.

    «Autour de nous, il y avait dix, quinze personnes qui vomissaient ou qui avaient les yeux en sang», nous précise-t-il.

    Autour de nous des gens vomissent, pleurent, hurlent. Dans la panique, certains courent retrouver leurs proches de l'autre côté des rails.

    Il décrit un sentiment de panique encore plus fort qu'à la station de métro Nation.

    Pour éviter un drame certains tirent l'alarme pour couper l'électricité des rails. Salutaire, mais ça ajoute l'alarme stridente à l'ambiance

    «C’est assez angoissant parce que pendant quelques minutes, on a vu qu’on ne pouvait pas sortir. On a eu l’impression d’être pris au piège», explique Fabien. «On ne savait pas si ça allait gazer plus.»

    Certains regards sont paniqués. Je crois qu'à un moment on a tous pensé que ça pouvait très mal finir. Mauvais souvenirs à Charonne...

    Au bout d'un quart d'heure, la voie est libérée par les CRS. «Devant notre air un peu flippé, j’ai l’impression d’en voir deux trois qui ont l’air d’être amusés de la situation», affirme Fabien à BuzzFeed News.

    C'est devant des flashball braquées sur nous que l'on réussit à sortir. Pas un mot d'explication. Certains CRS se marrent.

    Yann Schreiber, photojournaliste, a diffusé lui aussi plusieurs photos des événements sur Twitter.

    Un Periscope, diffusé par NnoMan, montre une personne sonnée par une chute lors de la bousculade à la sortie du métro Jacques Bonsergent.

    EN DIRECT sur #Periscope : URGENT !!! https://t.co/1Iy2qqPwYi

    «C'est les flics qui nous ont poussés dans l'escalier. Il y a eu un attroupement à cause de ça. Il est conscient, il est somnolent et il sait pas quel jour on est», explique un témoin interrogé par l'auteur de la vidéo.

    Voir cette vidéo sur YouTube

    youtube.com

    Voici quelques captures d'écran du Periscope, qui, comme toutes les vidéos du réseau social, disparaîtra 24 heures après sa capture.