Aller directement au contenu

    Des mannequins iraniennes arrêtées pour des photos Instagram «anti-islamiques»

    Les autorités iraniennes disent vouloir réprimer les femmes promouvant la «promiscuité occidentale».

    Les autorités iraniennes ont arrêté huit mannequins qui publient des photos d'elles sur Instagram. Ces autorités suppriment actuellement leurs comptes, qu'elles disent «anti-islamiques».

    Le tribunal de Téhéran chargé de la cybercriminalité a annoncé la nouvelle de l'arrestation ce week-end mais n'a pas révélé l'identité des mannequins. Les enquêteurs ont aussi dit avoir identifié au moins 170 personnes impliquées dans le mannequinat, la photographie et la mode sur Instagram.

    La police iranienne a annoncé avoir compilé une base de données de centaines de comptes Instagram iraniens populaires.

    Comme d'autres comptes Instagram dans le monde, ces comptes ont été utilisés pour partager des selfies et des photos de leurs propriétaires maquillées et portant des vêtements à la mode. Certains sont suivis par des centaines de milliers de personnes et, malgré l'arrestation des huit femmes, de nombreuses autres restent actives.

    Les arrestations faisaient partie d'une opération connue sous le nom de «Spider-2», visant les femmes qui utilisent Instagram et particulièrement celles ayant choisi de montrer leurs cheveux. Certains de ces mannequins auraient fui le pays.

    L'une d'entre elles, Elham Arab —qui est très suivie et est connue pour avoir les cheveux blonds— a été accusée de «promouvoir la promiscuité sexuelle occidentale». Lundi, elle a comparu devant le tribunal révolutionnaire iranien.

    Elle a ensuite été contrainte à s'excuser publiquement au tribunal. Dans ses excuses, elle a déclaré: «Tout le monde aime la beauté et la célébrité. Tout le monde aime être regardé, mais il est important de connaître le prix que cela peut coûter.»

    Melika Zamani, mannequin, actrice et styliste, a également été la cible des autorités à cause de son activité en ligne.

    Voici ce à quoi ressemble son compte Instagram –suivi par 360.000 personnes– actuellement:

    Les autorités iraniennes n'ont pas précisé si elles avaient pris le contrôle des comptes de réseaux sociaux des femmes arrêtées pour y supprimer leurs photos ou pour y publier des avertissements.

    Les arrestations sont perçues comme l'une des dernières tentatives du gouvernement iranien pour contrôler l'expression sur internet dans un pays qui emprisonne et détient régulièrement des artistes, des blogueurs et des activistes.

    Pendant une interview sur la télévision d'État dimanche dernier, Javad Babaei, l'un des procureurs du tribunal en charge de la cybercriminalité, a déclaré que ces femmes «créent et propagent une culture et une promiscuité immorales et anti-islamiques.»

    «Nous avons découvert qu'environ 20% des publications iraniennes sur Instagram sont gérées par la communauté du mannequinat», a-t-il ajouté.

    Tara Sepehri Far, membre de l'ONG Human Rights Watch et spécialiste des droits des femmes en Iran, explique que les attaques envers les utilisateurs de médias sociaux qui ne sont pas des activistes sociaux ou politiques sont «un phénomène relativement nouveau».

    «Avant, des gens ont été arrêtés et condamnés pour avoir publié sur les réseaux sociaux des informations jugées offensantes pour des membres du gouvernement, ou qui étaient perçues comme des menaces à la sécurité nationale», a-t-elle expliqué. «Mais depuis l'an dernier environ, le débat en Iran s'est orienté vers les questions de mœurs, et le gouvernement décide de la façon de traiter les personnes qui ne se conforment pas au style de vie adéquat.»

    Selon Tara Sepehri Far, l'utilisation des réseaux sociaux a aidé l'industrie de la mode iranienne à se développer, et les entrepreneurs et mannequins utilisent Instagram pour promouvoir leurs activités.

    «Pour le gouvernement, les arrestations récentes sont une toute nouvelle façon de faire comprendre qu'il existe une collaboration directe avec l'économie occidentale afin de corrompre le style de vie iranien», a-t-elle ajouté.

    Dans le cadre d'une autre initiative étrange des autorités iraniennes, un service de police qui surveille la culture et les réseaux sociaux a accusé Kim Kardashian de travailler pour Instagram en prenant part à un stratagème visant «les jeunes hommes et femmes» du pays.

    Mostafa Alizadeh, un porte-parole du Centre de surveillance et de lutte contre la cybercriminalité organisée, a déclaré à la télévision locale: «Mlle Kim Kardashian est une mannequin populaire... Il ne fait aucun doute qu'il y a également des contributions financières. Nous prenons cela très au sérieux.»

    BuzzFeed News a contacté Instagram et attend un commentaire.