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    Encore une fois, les femmes ne peuvent pas parler de harcèlement sur Twitter sans être harcelées

    La montée d'un hashtag contre le harcèlement de rue a, une nouvelle fois, donné lieu à une vague de harcèlement en ligne.

    La semaine internationale contre le harcèlement de rue se tient depuis le 3 avril, à l'initiative de l'association américaine Stop Street Harassment, et, en France, du collectif Stop au harcèlement de rue.

    Semaine internationale contre le #harcelementderue. @stophdr lance la campagne #QuiManqueDeTenueDansLaRue ? https://t.co/U4BIV8h5Xy

    À cette occasion, le collectif français, avec le projet Paie Ta Schnek, ont lancé le hashtag #StopHDR, pour que des femmes puissent partager et rassembler leurs témoignages.

    Le #harcelementderue est un fléau, dt les victimes sont extrêmement nombreuses. Pr rendre visibles ces violences, o… https://t.co/wDlYlfaakX

    Seulement, comme à chaque fois que des femmes prennent la parole sur les réseaux sociaux pour parler de harcèlement ou de violences sexuelles, des utilisateurs de Twitter s'adonnent à du harcèlement en ligne. Certains d'entre eux ont détourné le hashtag.

    Vers Boulogne, je prends une femme qui faisait du stop, généreux je lui donne 30€, elle a commencé à me faire des attouchements #stophdr

    Quand tu tweetes sur #stophdr alors que le dernier mec qui t'a parlé dans la rue c'etait en 2004

    Un bon pourcentage des meufs qui utilisent le hashtag #stophdr sont vegan J'en conclu que les violeurs sont herbivores

    D'autres ont balancé des insultes.

    Tout en les accusant de mensonges.

    Ou les incitant au suicide.

    Une femme qui tweete sous le pseudo Luciole Octopus a partagé ses expériences sur Twitter. Elle a autorisé BuzzFeed News a inclure ses tweets sans anonymisation.

    C'est elle qui a subi la plus forte vague de harcèlement en ligne mercredi 5 mars, avec plusieurs personnes qui ont récupéré sa photo de profil.

    Tout a l'heure mon chauffeur uber m'a dit de payer 25 euros la course il a cru que j'étais une pute ? je suis parti… https://t.co/DHPTOMZQi6

    Elle a passé son compte en privé après le déluge d'insulte qu'elle a reçu.

    «C'est arrivé quelques heures après», explique Luciole (c'est un pseudo). «Mon téléphone croulait sous les mentions.»

    «C'était la toute première fois» que Luciole subissait un tel harcèlement, elle dont le compte Twitter ne compte que quelques dizaines d'abonnés qu'elle connaît pour la plupart.

    Au moins un topic liés à ces tweets a été ouvert sur le forum Blabla 18-25 de jeuxvideo.com.

    Ce topic est resté en ligne une vingtaines d'heures, jusqu'à ce que BuzzFeed News fasse une demande de commentaire à Cédric Page, directeur général du Gaming chez Webedia, qui n'a toutefois jamais répondu à nos multiples demandes d'entretien depuis le mois de janvier.

    Un article de BuzzFeed News en janvier dernier montrait les failles de la modération, menée en partie par des bénévoles, sur le forum.

    Ces vagues de harcèlement ont des conséquences sur la façon dont ces femmes gèrent leur vie en ligne.

    «J'ai modifié certains paramètres de notification, demandé à des potes et à mon compagnon de s'occuper de bloquer des comptes», explique Luciole.

    Nawale, une autre personne qui a subi plusieurs vagues de harcèlement sur Twitter, explique à BuzzFeed News qu'elle a fortement limité le nombre de photos d'elle publiait sur le réseau social, et surtout qu'elle «ne met plus dans sa bio ses engagements militants» dans les combats afro-féministes.

    BuzzFeed News a également contacté Twitter pour comprendre pourquoi tant d'utilisateurs, présents pour certains depuis plusieurs années sur le réseau social, peuvent harceler des femmes en ligne avec cette impunité.

    Twitter a refusé d'évoquer ce cas précis «pour des raisons de sécurité et de vie privée» mais a évoqué les dernières avancées de la plateforme en matière de lutte contre le harcèlement, comme l'amélioration du signalement de tweets abusifs, ou l'utilisation d'algorithmes pour repérer les contenus abusifs avant qu'ils soient signalés. Sans préciser le fonctionnement de ces algorithmes.