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    Harcèlement sexiste à Saint-Cyr : un élève «tradi» exclu... mais finalement admis à l'école

    Info BuzzFeed - Si les élèves accusés de harcèlement moral et sexiste ont bien été exclus, certains ont toutefois pu passer les concours. D'après nos informations, au moins l'un d'entre eux intégrera Saint-Cyr à la rentrée. Le ministère des Armées n'y voit rien à redire.

    La ministre des Armées Florence Parly avait voulu se montrer intraitable après les révélations de Libération en mars dernier. Le quotidien avait en effet publié des témoignages édifiants de plusieurs femmes accusant les «tradis», un groupe d'élèves ultra-conservateurs, de harcèlement moral et sexiste contre les étudiantes en prépa de l'École spéciale militaire de Saint-Cyr à Coëtquidan, dans le Morbihan. Interrogée à l'Assemblée nationale en avril sur les mesures prises par le gouvernement pour tenter de faire cesser ces agissements, Florence Parly avait affirmé avoir «pris des sanctions» :

    «D'abord, l'exclusion de Saint-Cyr-l'École des élèves impliqués dans ces faits. Ensuite, le remplacement après les examens et les concours qui commencent dans quelques jours des cadres qui eux aussi sont concernés, assorti de mesures disciplinaires. Enfin, l'interdiction dans les classes préparatoires de ces établissements du redoublement pour les élèves perturbateurs.»

    Le 12 avril dernier, un conseil de discipline de deux élèves «tradis» avait bien eu lieu. Ils avaient été exclus définitivement de la prépa, comme le rapportait LCI. Mais rien ne les a empêchés de passer le concours. D'après nos informations, Paul*, l'un des chefs de ce clan des «tradis», a réussi les examens écrits puis oraux et pourra désormais intégrer l'École spéciale militaire de Saint-Cyr dès septembre prochain. Il l'a d'ailleurs annoncé fièrement jeudi 5 juillet sur sa page Facebook.

    «Le gueule pas trop fort, Libé veille», a commenté, amusé, un élève de cette même école militaire. «Je reste discret, tkt (t'inquiète, ndlr)», a répondu Paul.

    Rien à redire pour le ministère des Armées

    Contacté par BuzzFeed News, le cabinet du chef d’état-major de l’armée de Terre confirme l'admission d'au moins un élève pourtant exclu de la prépa, mais n'y voit absolument aucun problème. «Paul* a été exclu du lycée militaire de Saint-Cyr l’École le 12 avril 2018 par le conseil de discipline pour avoir organisé des activités interdites par le commandement. Il a donc terminé sa scolarité dans un établissement civil. Légalement, rien n’interdit à un candidat dont le casier judiciaire est vierge, et qui possède l’ensemble des conditions nécessaires, de passer un concours administratif. Il l’a fait et il a réussi», précise-t-on au ministère des Armées. Et d'insister :

    «Le jury, composé de professeurs agrégés en poste dans des classes préparatoires d’établissements civils et de lycées de la Défense et présidé par deux inspecteurs généraux de l’Éducation nationale et deux officiers supérieurs de l’armée de Terre, dont un officier féminin, est impartial et totalement indépendant. Il n’y a donc pas lieu de remettre en cause ses décisions.»

    Faibles réactions

    Malgré la volonté affichée de ne plus laisser passer de tels comportements, les sanctions ont été faibles. Comme le rapportait Libération en juin dernier, neuf élèves sont passés devant le conseil de discipline. À l'exception du chef du clan des «tradis» et de Paul* son numéro 2, qui ont été définitivement bannis du lycée à la demande du corps professoral, les sept autres élèves ont été exclus 15 jours. En cause : leur participation à un sketch violemment misogyne réalisé au lycée à l’automne 2017, et dans lequel ils menaçaient de «scalper les filles», péjorativement appelées «les grosses». Ils ont en tout cas tous été autorisés à passer le concours pour intégrer l’École spéciale militaire (ESM) de Saint-Cyr Coëtquidan.

    Le colonel qui dirigeait le lycée militaire depuis 2015 a lui été muté. Avant son départ, il a toutefois pu inaugurer une stèle rendant hommage... aux «tradis».

    Pour rappel, les nombreux témoignages recueillis par Libération évoquaient de la part de ce groupe masculiniste des «coups de pied dans les portes la nuit pour empêcher les filles de dormir, défécation devant leur chambre, refus de manger à la même table qu’elles à la cantine, menaces de «scalp», pancartes «à mort les grosses» affichées dans l’internat...»

    *Le prénom a été modifié