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    François Fillon et l'IVG: entre revirement et positions floues

    Il a par exemple affirmé en 2015 que l'avortement était un droit fondamental avant de revenir sur ses propos en 2016 et admettre qu'il avait fait une erreur en disant ça.

    Deux jours après sa large victoire surprise au premier tour de la primaire de la droite, François Fillon a été attaqué par son rival Alain Juppé sur ses positions vis-à-vis de l'avortement.

    Invité sur Europe 1 mardi, Alain Juppé a appelé son adversaire à «clarifier sa position» sur l'avortement, qui est un «droit fondamental» pour lui.

    «Il y a des points sur lesquels j'aimerais bien que François Fillon clarifie sa position, par exemple sur l'avortement et l'interruption volontaire de grossesse. Il a commencé par dire dans son livre que c'était un droit fondamental de la femme, puis il est revenu sur cette déclaration dans un débat qu'il a eu devant un certain nombre de ses supporters. Quelle est sa position? Y a souvent du flou», explique-t-il.

    «C'est une différence entre nous, je considère que l'avortement est un droit fondamental», ajoute le maire de Bordeaux.

    En déplacement à Viry-Chatillon mardi, François Fillon a répondu aux propos d'Alain Juppé tenus le matin même en affirmant n'avoir jamais été contre l'avortement.

    «Ça fait 30 ans que je suis parlementaire, est-ce qu’une seule fois j’ai pris une position contre l’avortement? Une seule fois? Est-ce que vous avez vu une seule fois dans un programme de François Fillon des propos concernant le retour sur la loi Veil? Jamais. J’ai voté tous les textes qui ont permis la mise en œuvre de la loi Veil», a indiqué François Fillon.

    François Fillon ne veut pas revenir sur la loi Veil, mais il était opposé à la réforme débattue en 2014 à l’Assemblée nationale qui prévoyait d’assouplir le recours à l'IVG, dans le cadre de la loi sur l'égalité entre les femmes et les hommes. Et il l'a répété à plusieurs reprises.

    - Dans une interview au Figaro en janvier 2014, il expliquait être opposé à cette réforme «pas du tout parce que je prône un retour en arrière. Mais rouvrir le débat aujourd’hui, pour des motifs idéologiques qui ne vont rien changer à l’application même de cette loi, ne conduit qu’à durcir les positions.»

    - Dans un post de blog publié aussi en janvier 2014, il parlait même de faute morale: «En choisissant de réécrire la loi de 1975 sur l’IVG, le gouvernement fait une faute morale et politique. Faute morale car il risque de "banaliser" l’avortement qui, selon les termes de Simone Veil, devait rester "l’exception". Faute politique, car il prend le risque de diviser, une fois encore, les Français.»

    Il s'est aussi exprimé sur la suppression de la notion de détresse présente dans le cadre de cette loi. Il disait en mars 2014 à La Croix que «c’était une provocation inutile».

    Il a aussi ajouté que «chacun sait que, dans la pratique, on ne demande jamais aux femmes de prouver une situation de détresse. Surtout, cette réforme vient rompre l’équilibre de la loi Veil. L’avortement ne sera jamais pour une femme un acte anodin.»

    Selon franceinfo, qui cite Terrafemina, «François Fillon s'est bien gardé de voter contre cet amendement, préférant, le jour du vote, jouer aux abonnés absents».

    La même année, François Fillon faisait partie des 27 députés UMP qui ont voté en faveur de la résolution réaffirmant le droit fondamental à l'IVG.

    En 2015, dans son ouvrage Faire, il a réaffirmé cette position. Pourtant, un an après, lors d'un meeting à Aubergenville (Yvelines) le 22 juin, il est revenu sur ses propos.

    «Dans mon livre, j'ai commis une erreur quand j'ai écrit que l'avortement était un droit fondamental. C'est pas ce que je voulais dire. Ce que je voulais dire, c'est que c'est un droit sur lequel personne ne reviendra. Compte tenu de ma foi personnelle je ne peux pas approuver l’avortement.»

    C'est très probablement à ce meeting qu'Alain Juppé fait référence quand il évoque la position «floue» de François Fillon sur l'avortement.

    François Fillon s'est d'ailleurs justifié sur ce revirement en octobre dernier sur le plateau de L'Émission politique sur France 2. Il a indiqué qu'il n'a pas à se justifier sur ses convictions personnelles et qu'il est capable de «faire la différence entre ces convictions et l'interêt général, qui n'est pas d'ouvrir ce débat.»

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    Il précise que personne (sous-entendu, lui) ne reviendra sur le droit à l'avortement avant d'admettre que le mot de «droit fondamental était un mot qui pouvait choquer, c'était pas la bonne écriture».

    Mais le soutien qu'il a reçu de Sens commun, mouvement anti-mariage pour tous, en septembre dernier, a brouillé son discours. On retrouve d'ailleurs sur le site officiel du candidat une interview pas anodine du président de Sens commun publiée dans Famille chrétienne.

    Dans cet entretien, Christophe Billan parle notamment des positions de François Fillon sur l'avortement. Et il affirme que le favori de la primaire est personnellement opposé à l'avortement.

    «Sur l’avortement, il s’en est expliqué très clairement auprès de nous. Il a dit, et je le crois, que ce qu’il avait écrit dans son livre n’était pas assez clair. Au regard de la situation actuelle, il estime qu’il n’est pas possible de revenir sur cette loi mais, en son âme et conscience et en raison de sa foi, il y est personnellement opposé.»

    Le président de Sens commun déplore ensuite qu'on ne puisse «malheureusement pas appuyer sur un bouton et faire disparaitre l’IVG». Avant de dire qu'il «faut faire un travail de reconquête intellectuelle, culturelle et spirituelle pour pouvoir aller plus loin. Et pour ça, une fois encore il faut les digues que nous entendons bâtir aux côtés de Francois Fillon.»