Aller directement au contenu

    On a rencontré des jeunes qui vont voter pour Marine Le Pen à la présidentielle

    Ils ont moins de 25 ans et voteront Marine Le Pen à la présidentielle par conviction ou parce que les autres candidats n’ont pas répondu à leurs attentes. Rencontre avec six jeunes venus assister à son meeting bordelais.

    Debout sur l’un des sièges noirs réservés aux membres du Front national de la jeunesse (FNJ), Candice agite vigoureusement le drapeau français qu’on lui a tendu en entrant dans le parc des expositions de Bordeaux. Marine Le Pen y tenait un meeting dimanche 2 avril dans une salle de 1500 sièges environ. Un meeting au cours duquel la présidente du FN s'est particulièrement adressée à la jeunesse française. Son badge clignotant «Marine Présidente» à moitié dissimulé sous ses longs cheveux châtains, Candice assiste pour la première fois à un meeting de la présidente du Front national. «Mais je suis d’ores et déjà certaine de voter pour elle», lance cette opticienne de 19 ans à BuzzFeed News.

    Originaire du Marmandais en Nouvelle-Aquitaine, Candice suit et écoute depuis des mois les propositions de la candidate FN. «Son programme m’intéresse vraiment, surtout ce qu’elle propose pour les jeunes, comme avancer l’âge de la retraite pour laisser les gens partir plus tôt et nous laisser trouver du travail», déclare la jeune femme. «J’ai trouvé confiance en Marine alors que chez les autres candidats, certains veulent justement retarder la retraite», explique Candice, avant d’ajouter que c’est «bien de se concentrer sur la France aussi parce qu’elle en a besoin».

    Avec sa famille et ses amis, elle assure qu’elle n’a pas de problèmes à révéler son vote, car elle côtoie beaucoup de pro-Le Pen. Mais en soirée par exemple, elle s’abstient de dire qu'elle va voter Le Pen «pour éviter qu’il y ait des confrontations car Le Pen reste un gros mot pour beaucoup de jeunes».

    Assis au premier rang de la tribune située à quelques mètres de Candice, Benjamin raconte que c’est parfois un peu compliqué de parler de Marine Le Pen à la fac. Étudiant en master de droit public à Bordeaux, le jeune homme de 21 ans s’agace des prises de position de certains de ses professeurs. «C’est difficile d’afficher son soutien au Front national à l’université, les profs dans leurs cours tiennent des propos où l’on sent bien qu’ils n’aiment pas Marine Le Pen, mais c’est difficile de débattre avec eux», explique-t-il. Alors il se tourne vers son cercle d’amis et sa famille.

    Comme son père, qui compte voter FN pour la première fois après des années de vote socialiste. Benjamin est venu au meeting bordelais «par conviction», car il veut élire un président qui «doit appeler à retrouver la souveraineté de la France et dont la politique d’immigration doit être ferme». Comme Candice, Benjamin choisira le vote blanc en cas d’élimination de Marine Le Pen au premier tour. «Je ne voterai jamais de la vie pour Macron, et Fillon non plus, car il a un programme économique trop dur.»

    «Avant je soutenais Fillon, mais il s’est renié depuis la primaire»

    Alors que la salle se remplit au son du Boléro de Maurice Ravel, et que sur les écrans apparaît un diaporama des déplacements de Le Pen, trois jeunes prennent place au dernier rang de la tribune. Parmi eux, Henry qui est «quasi certain de voter Marine». En décembre dernier, rien n’était moins sûr pour cet étudiant en finances de 21 ans qui pensait donner son vote à François Fillon.

    «Avant, je votais Fillon, mais il s’est renié depuis la primaire en changeant de programme, sans parler des affaires très graves qui lui sont tombées dessus. Tout ça m’a convaincu d’aller voir ailleurs.»

    S’il admet qu’il y a de très grandes différences entre les programmes de Fillon et Le Pen, il dit être séduit par le programme européen de la présidente du FN. «Ce qui me plait chez elle, c’est l’indépendance et la souveraineté, et pour moi il est très important qu’on sorte par exemple de l’OTAN, à cause de qui on a des guerres qui ne sont pas les nôtres», raconte le jeune homme.

    Assise à sa gauche, Amanda acquiesce. Elle aussi votait autrefois LR, mais cette sarkozyste de cœur n’a jamais digéré l’élimination de son chouchou à la primaire de la droite. «J’étais très déçue, je suis allée jusqu’à découper ma carte des LR car je n’ai pas voulu soutenir Fillon», explique l’étudiante en droit à l’université de Bordeaux. «Je pense voter Nicolas Dupont-Aignan au 1er tour, mais si je suis présente au meeting de Marine Le Pen, c’est parce que NDA ne sera pas au 2nd tour, mon suffrage se portera alors sur elle», assure Amanda. «C’est parce qu’elle est une femme, parce qu’elle met le respect de la laïcité et la sécurité en avant et parce qu’elle a un ancrage populaire que je voterai pour elle», dit la jeune femme qui fustige Fillon, «candidat des riches». Elle admet tout de même que son vote est un «choix par défaut» car elle sait «que les déclarations de patrimoine de MLP ont posé un petit problème» et que «ce n’est pas la meilleure candidate».

    «Voter Le Pen aujourd’hui, c’est beaucoup plus décomplexé»

    Marie n’en est pas à son premier meeting frontiste. Cette étudiante en droit de 23 ans a fait le chemin depuis la Bretagne pour écouter la candidate d’extrême droite exposer son programme. Elle est convaincue depuis longtemps par Marine Le Pen, d’ailleurs, en 2012, elle avait déjà glissé son nom dans l’isoloir. «Je pense que Marine représente une chance pour la France, avoir une femme à la tête de l’État, ce serait une victoire. En plus, elle a un tel charisme quand elle va à l’étranger…», explique la jeune femme. Persuadée qu’elle sera qualifiée pour le second tour de la présidentielle, Marie sent une dynamique qui, selon elle, n’existait pas il y a cinq ans. «Aujourd’hui, voter Le Pen, ça s’est beaucoup décomplexé, surtout chez les jeunes qui trouvent un renouveau chez elle et pas à gauche», assure l’étudiante.

    Une vision que partage Maxence, 24 ans, qui travaille dans un magasin de vêtements dans la région nantaise. Venu en voiture, l’homme au total look cuir compte déjà cinq meetings de la candidate frontiste dans son agenda pour cette seule campagne. Il est persuadé que cette élection sera la bonne pour le Front national. «Dans ses meetings, il y a quelque chose qui a été dépassé, comme une sorte de prise de conscience qu’on pouvait cette fois conquérir l’Élysée», dit le jeune homme avec beaucoup de ferveur. Il s’appuie sur le Brexit pour illustrer son propos car selon lui, à l'image des Britanniques, «les Français en ont marre de cette Europe qui nous gouverne et qui n’a pas su diminuer le chômage et stopper les terroristes».

    Dans l’entourage de Maxence, on vote de plus en plus FN selon lui. Mais il insiste sur le fait qu’il est encore difficile pour certains jeunes de dire tout haut leur soutien au Front national. «Mais Marine Le Pen a réussi à dédiaboliser un parti qui pourtant avait les bonnes idées pour relever la France depuis le début. Mais on y est presque et vous verrez le 23 avril, comme pour le Brexit et pour Trump, tout le monde tombera de sa chaise. C’est pas comme si je ne vous avais pas prévenus.»