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    Au meeting de Valls, on vient applaudir le candidat de la laïcité ferme

    Le candidat à la primaire de gauche tenait un meeting vendredi soir à Paris. Qu'ils soient militants ou simples spectateurs, beaucoup sont venus applaudir les positions fermes de Valls sur la laïcité. Reportage.

    «Je ne veux plus que nous cédions un pouce sur la laïcité! Quand on est de gauche, on accepte pas que le machisme et l'ordre religieux s'imposent sur les lois de la République. La laïcité c’est pour chacun de croire ou de ne pas croire et c’est pour ça que je veux qu’une charte de la laïcité soit adossée à notre Constitution, pour réaffirmer toute sa force, toute sa valeur et pour qu’elle s’applique partout!»

    C'est le moment où la salle se lève, pour acclamer son candidat. Sur scène Manuel Valls jubile, il sait qu'il vient là d'aborder l'un des thèmes-phares de sa campagne: la laïcité. Debout depuis une trentaine de minutes sous les dorures du Trianon, une salle de spectacle parisienne située à mi-chemin entre Pigalle et Barbès, l'ex-premier ministre tient son dernier meeting avant le vote de dimanche. Et depuis sa déclaration de candidature à la Présidentielle, la laïcité est au cœur de ses discours. Dans son projet pour la France, il développe son idée d'adosser une Charte de la laïcité à la Constitution, une mesure qu'il est le seul à défendre.

    C'est bien pour cette raison que Serge est venu le voir ce vendredi. Assis sur un siège, au balcon, ce grand gaillard affublé d'un béret gris adhère à cette proposition.
    «On sait que la loi de 1905 exige une neutralité de l’état, mais est-ce que l’État fait vraiment son travail?», s'interroge cet expert-comptable de 30 ans qui réside à Paris. «On sait qu’il y a une séparation entre l'Église et l'État, mais on a le sentiment aujourd'hui que tout le monde s'en fiche, que personne n'a la même vision que les autres. Le fait que Manuel Valls insiste et souhaite inclure une charte dans la Constitution est une bonne chose car elle permettra à tous les Français d'être sur la même ligne», dit-il à BuzzFeed News.

    «La France fonctionne de plus en plus en communauté et ça ne me plaît pas du tout»

    Alors que certains membres du gouvernement (parmi lesquels la ministre du Travail Myriam El Khomri et Laurence Rossignol, ministre des Droits des femmes) prennent place au premier rang du Trianon, quelques rangs derrière Sandra fouille dans son sac. Elle nous montre sa carte du Parti socialiste et revendique fièrement 15 années d'adhésion. À 52 ans, cette mère de deux enfants qui travaille dans la communication, avait déjà soutenu Valls lors de la Primaire citoyenne de 2011 car à l'époque déjà «il était le seul à être clair sur la laïcité». Cinq ans après, la France a bien changé selon elle. «La société française fonctionne de plus en plus en en communauté et ça ne me plaît pas du tout. Les gens se referment car c’est la crise, ils se referment sur des gens qui leur ressemblent. Et les attentats ont accentué mon ressenti», estime-t-elle.

    Manuel Valls semble être alors à ses yeux, l'homme providentiel. «Il a été maire d'Evry, une ville où y a un sacré melting pot et il l’a bien gérée car il a su la faire évoluer. Un président doit avoir une une expérience de terrain,. Le Front national, ils ont beau dire, beau faire, ils n’ont aucune expérience de terrain. La laïcité, ça ne se décide pas un beau matin de la gérer comme ça, faut vraiment avoir vécu l’expérience du terrain.» Si elle considère que l'islam «n'est pas un problème», elle concède néanmoins que les attentats ont cristallisé les débats sur la deuxième religion de France. «C'est pour cela qu'il faut mieux organiser les choses. Les imams doivent parler français et prêcher dans la langue de Rabelais. On l’a fait avec la religion catholique. Avant la messe était en latin, depuis qu’elle est en français tout le monde l’a comprend et ça va beaucoup mieux!», ajoute Sandra.

    Marylise, a fait le chemin depuis Champigny-sur-Marne pour assister au meeting du candidat pour qui elle tracte régulièrement. Elle est «plutôt d'accord» avec l'idée de Manuel Valls d'inscrire une Charte de la laïcité dans la Constitution car «les hommes politiques ne parlent pas assez de la laïcité».

    Selon cette retraitée, les musulmans en particulier ont besoin d'un homme comme lui: «Il y a des musulmans qui attendent qu’on soit fermes par rapport à ceux qui essaient de manipuler leur coreligionnaires dans un certain sens. C’est là qu’il est courageux et sans ambiguïté.»
    Elle explique qu'elle a tracté dans sa ville, et que certaines femmes musulmanes se sont montrées hostiles à son égard. «En tractant, au marché, j'ai expliqué à une femme voilée de la tête au pied que le modele français c’est la République, c'est la laïcité. Quand elle a su que je soutenais Manuel Valls elle s'est montrée très insultante. Valls veut réaffirmer la laïcité pour se la réapproprier, on en a besoin, il doit gagner.»

    Marylise admet toutefois que la polémique autour du burkini n'a pas été bien gérée par l'ancien Premier ministre. «À mon sens, il a fait une erreur. Il n’aurait pas dû prendre le sujet en frontal comme ça, il aurait peut-être fallu l’amener différemment. Il faut dire qu'on était dans une période d’hystérie incroyable, mais sur le fond j'étais d’accord pour qu'on interdise le burkini. Quelques mois après les attentats, c'était une provocation de la part de ses femmes. La laïcité doit justement empêcher ce genre de comportement.»

    «La laïcité, c'est éliminer tous les signes religieux pour tout le monde»

    Certains supporters ne soutiennent pas pour autant cette charte, comme André. À 76 ans, ce retraité qui travaillait autrefois dans la banque garde un œil vif sur cette primaire. Mais selon lui, «ce n’est pas le sujet le plus important, mais les finances». Il ajoute: «Mettre la laïcité dans la Constitution c’est inutile, on a d’autres chats à fouetter, il faut appliquer la loi de 1905, elle est suffisante.» Mais il se montre particulièrement sévère sur les musulmans. Il cite pour exemple le cas d'une femme voilée, qui est intervenue dans l'Emission Politique sur France 2 face à Manuel Valls, il y a deux semaines.

    «Lorsqu’à la télévision une femme voilée défendait le voile devant Valls, elle faisait le jeu du Front national, c’est très malheureux et ça ne rend pas service. Je comprends qu’intérieurement certaines le portent volontairement, mais combien le portent parce qu'elles y sont contraintes? Dans certains pays vous êtes obligés de porter le voile, toute personne qui vient en France doit respecter la laïcité, c'est-à-dire éliminer tous les signes religieux pour tout le monde».