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    Comment l'attentat déjoué est récupéré pour défendre la loi renseignement

    Et pourquoi ce n'est sans doute pas le meilleur argument.

    Le projet d'attentat déjoué à Paris dimanche montrerait que la loi sur le renseignement va dans le bon sens.

    C'est, peu ou prou, le message véhiculé par plusieurs partisans de la mesure depuis l'annonce par le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, mercredi, de l'arrestation d'un terroriste présumé, Sid Ahmed Ghlam. Ce dernier est accusé d'avoir planifié un attentat contre une ou plusieurs églises à Villejuif.

    C'est par exemple la position de Manuel Valls.

    Avec la loi portée par son gouvernement, il y aurait eu «plus de moyens» à disposition des «services de renseignement pour effectuer un certain nombre de surveillances», a affirmé le Premier ministre sur France Inter ce jeudi. Il assure par ailleurs que la décision de communiquer autour de cet attentat avorté n'est pas liée au débat en cours autour de la réforme du renseignement.

    D'autres partisans de la loi sur le renseignement sont du même avis, comme le président du groupe PS au Sénat.

    Nouvel attentat déjoué hier et on chipoterait sur la loi renseignement ?

    Ce qui est loin de convaincre ceux qui s'y opposent:

    .@dguillaume26 est-ce que vous pouvez m'expliquer le lien entre l'arrestation d'hier et le #PJLRenseignement ?

    Alors, peut-on vraiment faire le lien entre les deux? La loi sur le renseignement aurait-elle vraiment été utile pour déjouer plus tôt ce projet d'attentat? Plusieurs éléments laissent penser que non.

    D'abord, il faut rappeler que Sid Ahmed Ghlam a été arrêté de manière plutôt «fortuite», comme l'explique Le Monde. Il se serait en effet lui-même blessé avec son arme avant d'appeler les secours. C'est par l'intermédiaire de ces derniers que les forces de l'ordre sont intervenues, ont retrouvé la trace du véhicule du jeune homme et y ont découvert des armes.

    Le suspect était connu des services de renseignement depuis 2014 et il faisait l'objet d'une «fiche S» (sûreté de l'Etat) de leur part. Malgré cela, il n'a pas pu être inquiété auparavant. «Nous avons procédé à toutes les vérifications qui devaient être faites. A partir du moment où ces vérifications ne révèlent pas de connexions avec des milieux terroristes, nous sommes dans un État de droit et dans un État de droit, nous luttons contre le terrorisme en respectant les principes du droit», a justifié Bernard Cazeneuve au 20h de TF1 mercredi.

    En clair, avoir plus de moyens pour surveiller Sid Ahmed Ghlam n'aurait pas suffi à justifier son arrestation avant dimanche. «A moins de légaliser les arrestations arbitraires, ce qu'elle ne prévoit pas, la loi renseignement n'aurait donc probablement pas permis de contenir le "risque" que représentait Sid Ahmed Ghlam», conclut le Huffington Post.

    Le fait que «cinq projets d'attentats» ont été déjoués depuis le début de l'année (en fait, depuis août 2013, voir ci-dessous), comme l'a indiqué Manuel Valls ce mercredi, montre que la menace terroriste est réelle. Mais cela ne fait pas des événements de ces derniers jours un bon argument pour défendre le projet de loi du gouvernement.

    Manuel Valls s'est emmêlé les pinceaux: ce sont bien cinq attentats qui ont été déjoués en France, mais depuis août 2013 et pas depuis janvier 2015. Nous avons donc ajouté cette précision dans l'article.

    Valls s'est emmêlé les pinceaux ce matin sur Inter. 5 attentats ont été déjoués depuis 08/13 et non depuis janvier.

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