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    Cette femme n'a pas pu acheter une bouteille d'eau parce qu'elle était voilée

    «Je trouve désolant que, constamment, on pense que l'on peut s'en prendre aux femmes voilées en pensant qu'elles ne sauront pas quoi répondre.»

    Le 30 juillet, @Nadia_Elka a tweeté qu'à Marseille, dans le quartier des Goudes, une restauratrice avait refusé de lui vendre une bouteille d'eau car elle était voilée.

    Dans une série de tweets, elle raconte que la restauratrice lui aurait dit qu'elle n'avait pas le droit de rentrer et qu'il s'agissait de «consignes de la police».

    Elle dit ensuite s'être rendue avec son amie dans un autre commerce, où elle a acheté sa bouteille d'eau.

    Contacté par BuzzFeed News, le commerçant confirme lui avoir vendu une bouteille d'eau.

    Selon elle, ces commerçants n'étaient, eux, pas au courant d'une telle consigne.

    Elle a ensuite indiqué être retournée là où on lui aurait refusé l'entrée, pour dire à la restauratrice que c'était «stupide de sa part».

    Son tweet initial a été retweeté plus de 200 fois.

    Nadia, 28 ans et qui travaille dans l'humanitaire, dit à BuzzFeed News qu'une de ses abonnés Twitter a ensuite posté un commentaire sur la page Facebook du restaurant. «Je l'ai suivie et beaucoup d'autres l'ont fait», dit-elle. Là encore, on lui aurait répondu qu'il s'agissait d'une demande de la police.

    Elle indique que le restaurant a ensuite «supprimé» sa page, qui n'est aujourd'hui plus accessible.

    «Je ne lui ai pas du tout interdit l'accès, je lui ai juste dit je n'avais pas le droit de faire entrer des gens qui ont la tête couverte dans mon établissement», se défend la restauratrice de Chez Caro it's Goudes, contactée par BuzzFeed News.

    Elle explique à nouveau que «c'est la police qui m'a dit de ne pas laisser entrer des personnes avec la tête couverte». Et ajoute:

    «J'ai dit la même chose à un homme avec un casque. Là, elle avait un voile sous le menton et des lunettes. Je lui ai dit qu'il n'y avait rien de mal intentionné; elle m'a demandé de m'excuser et je me suis excusée.»

    «Elle était avec une copine qui n'était pas couverte, qui aurait très bien pu prendre de l'eau et repartir», avance la restauratrice, qui estime que la jeune femme «a fait tout un pataquès» sur ce qu'il s'était passé.

    Elle nous a expliqué avoir suspendu sa page Facebook à cause de commentaires négatifs.

    «Je n'allais quand même pas rester dans la rue à attendre mon amie pour satisfaire une excuse aussi stupide» estime de son côté Nadia, qui dit avoir préféré ne pas s'attarder et «passer au commerce suivant».

    Le service communication de la Direction départementale de la sécurité publique (DDSP) de Marseille, contacté par BuzzFeed News, a expliqué ne pas pouvoir commenter ce cas particulier sans avoir les éléments matériels comme des éléments photographiques.

    «Si jamais la personne dépose une plainte, il y aura une enquête et on ira voir ce qu'il s'est passé, voir s'il y a une discrimination éventuelle», déclare la DDSP.

    Elle tient cependant à préciser qu'«il ne faut pas rentrer dans un commerce le visage masqué», que ce «sont des consignes de sécurité élémentaire, notamment pour éviter les braquages», et que le port du niquab «est réglementé dans l'espace public».

    En effet, la loi sur l’interdiction de la dissimulation du visage dans l’espace public, entrée en vigueur en 2011, indique que «nul ne peut, dans l'espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son visage». Interdit à l’école, le hijab n’est lui pas interdit dans l’espace public.

    En l’occurrence, «mon visage était visible», précise la jeune femme.

    «C'était un "hijab", je portais un pantalon, une tunique jusqu'au genou et un voile qui couvrait ma tête. Et je portais des lunettes de soleil, mais rien ne l'interdit.»

    Elle raconte ne pas savoir si elle va «prendre le temps de déposer plainte car cela ne m'a pas du tout affectée».

    «C'était stupide et hilarant à la fois. J'ai passé une très bonne après-midi malgré tout et nous lui avons dit ce que l'on en pensait sur place.

    Je trouve juste désolant que constamment, on pense que l'on peut s'en prendre aux femmes voilées en pensant qu'elles ne sauront pas quoi répondre.»

    «Dieu merci cela reste une minorité de personnes, j'ai tendance à m'arrêter sur ceux qui sont ouverts, comme le restaurant voisin, chez qui je retournerai sûrement», conclut-elle.