Des milliers de personnes ont marché dans des dizaines de villes dans toute l'Argentine après que le meurtre horrible d'une adolescente a bouleversé le pays.

Chiara Páez, une jeune fille âgée de 14 ans et habitant Rufino dans la province de Santa Fe, a été violemment battue par son petit ami de 17 ans puis enterrée vivante.
Chiara Páez tenía apenas 14 años, cuando fue asesinada a golpes por su novio. #NiUnaMenos #VzlaApoya
Elle était enceinte, et des membres de la famille de son petit ami ont aussi été arrêtés, accusés de lui avoir donné des pilules pour provoquer un avortement.
Plusieurs cas similaires ont refait surface au cours des semaines écoulées. Les ONG affirment qu'en Argentine, une femme est tuée toutes les 35 heures.

Ce tweet a appelé les gens à descendre dans la rue, ce qu'ils ont fait le 3 juin. «Actrices, politiciennes, femmes d'affaires, femmes influentes... Les femmes, toutes ensemble... N'allons-nous pas élever la voix? NOUS SOMMES ASSASSINÉES.»
Actrices, políticas, artistas, empresarias, referentes sociales ... mujeres, todas, bah.. no vamos a levantar la voz? NOS ESTAN MATANDO
Le slogan du mouvement, au début «Ils nous tuent», est vite devenu #NiUnaMenos (#PasUneDeMoins). Le hashtag s'est placé dans les tendances pendant plus de trois semaines en Argentine, avec des milliers de posts chaque jour.

Les ONG disent que 1808 femmes ont été tuées en Argentine au cours des sept dernières années.

C'est un problème mondial, mais en Argentine en particulier, certaines inégalités structurelles entre les hommes et les femmes sont profondément enracinées dans notre culture, et la violence est le vecteur permettant à ces inégalités de persister.
Les chiffres parlent d'eux-même, bien qu'il soit difficile de dire si le nombre de cas a augmenté ou si ce problème devient simplement plus visible à présent.

Un autre meurtre qui a choqué l'Argentine est celui de Suhene Carvalhaes Muñoz, qui a été battue si violemment par son petit ami qu'elle est morte de ses blessures huit mois après l'attaque.

Sa sœur a raconté à la presse locale que lorsque Suhene a signalé l'abus, la police lui a dit de «régler les choses au lit».
La familia de Suhene, Catarina, Sarah y Savik, tambien alzan su voz x #NiUnaMenos. http://t.co/sHBrlyEIE4
La croyance répandue en Argentine dit qu'il vaut mieux régler les problèmes des femmes à la maison, l'un des mythes que les organisateurs de la marche tentent de briser.

[Certains mythes] sont l'idée que les hommes sont violents de naissance, que les femmes sont passives, que seuls les gens pauvres ont ce problème, et que si une femme reste en couple, c'est parce qu'elle aime être maltraitée, qu'il vaut mieux ne pas interférer dans les problèmes de couple.
«Lorsque je me suis exprimée, le plus difficile a été de supporter les gens qui me jugeaient, toutes les questions et la gêne», a raconté à BuzzFeed News une femme qui a été abusée pendant 14 ans. Elle a demandé à rester anonyme pour protéger ses enfants.

Les enfants sont également victimes de violences sexistes. Sur la seule année passée, il y a eu 29 cas de «féminicides liés» ou une tierce personne a été blessée à cause de la violence d'un homme envers une femme.

Ces cas ont donné naissance à de grands débats sur les violences sexistes dans toute l'Amérique latine, des pays comme le Chili et l'Uruguay se joignant à la cause argentine le 3 juin.

Bien que l'Argentine dispose de lois progressistes, le budget pour les faire respecter reste modeste, et l'éducation des fonctionnaires responsables de leur application est insuffisante.

De nombreux féminicides auraient pu être évités si les signalements avaient été écoutés.
Pendant la marche du 3 juin, les familles ont apporté des photos de leurs proches décédés suite à des violences sexistes, et des artistes locaux ont dessiné des caricatures sur le sujet.

Même la présidente, Cristina Fernández de Kirchner, a soutenu le mouvement en tweetant sur son compte officiel: «Ce n'est pas juste le problème de la justice ou de la police. Nous sommes confrontés à une culture qui anéantit le féminin.»
No es sólo un problema judicial o policial. Estamos ante una cultura devastadora de lo femenino.
Les stars nationales comme le joueur de football Lionel Messi ont promu la campagne en ligne.

Mais tout le monde n'a pas soutenu le mouvement #NotOneLess.

Le hashtag #NiUnHuevoMenos (#PasUneCouilleDeMoins) a été utilisé pour faire des commentaires sexistes, raillant l'initiative #NotOneLess.
#NiUnHuevoMenos:
«Arrêtons de toujours devoir payer. NOUS VOULONS L'ÉGALITÉ, BON SANG! Pour mes droits, les vôtres, et ceux de tous les hommes. #NotOneBallLess»
Basta de tener que pagar vos siempre. QUEREMOS IGUALDAD CARAJO! Por mis derechos,por los tuyos,por los de todos los hombres. #NiUnHuevoMenos
«Si vous fréquentez quelqu'un et que vous le laissez vous frapper, vous ne pouvez vous en prendre qu'à vous-même d'être stupide, #NotOneBallLess»
si vos estas con alguien y permitís que te pegue, cagate por pelotuda #NiUnHuevoMenos
«Bande d'hypocrites! Arrêtez de dire ce que les gens veulent entendre. Beaucoup de femmes et d'hommes PROVOQUENT la personne du sexe opposé pour qu'elle s'emporte et les frappent!»
Hipócritas! Dejen d decir lo q la gente quiere escuchar. Muchas mujeres y hombres PROVOCAN a su sexo contrario para q se saquen y golpeen!
Même une présentatrice TV populaire a demandé à l'une de ses invitées «ce qu'elle avait fait» pour mériter d'être frappée par son ex petit ami.
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Elle s'est ensuite excusée.
Il y a quelques années, les médias locaux parlaient de «crimes passionnels» ou de «crimes au nom de l'amour» pour évoquer les féminicides.

Mais il y a désormais des manifestations dans tout le pays, avec près d'une centaine de marches dans plusieurs villes.

Le mouvement féministe en Argentine remonte à 30 ans. Ces manifestations massives sont les premières à rassembler différents groupes.
