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    «Ils ne sont pas éduqués» : un policier parisien accusé d’avoir insulté des collégiens de banlieue

    «On a l’habitude de subir les regards des gens dans le métro et dans la rue. Mais de la part des représentants des forces de l’ordre, c’est inacceptable», explique le CPE du collège de Seine-Saint-Denis à BuzzFeed News.

    Jeudi 31 mai, des élèves de 6e du collège Barbara de Stains (Seine-Saint-Denis) ont effectué une visite à Paris. Une sortie qui, d'après les enseignants du collège, a tourné au vinaigre.

    Dans un communiqué de presse publié sur Twitter, le CPE du collège, présent lors de la visite, raconte ce qu'il s'est passé avec des policiers dans les 4e et 5e arrondissements de Paris.

    Aujourd’hui, en sortie scolaires dans Paris, nous avons été, élèves et enseignants victimes de propos discriminants et insultants de la part d’un représentant des forces de l’ordre. Ne rien laisser passer. https://t.co/tEaAnViARr

    Six enseignants du collège se sont rendus en visite scolaire à Paris avec 45 élèves, la plupart âgés de 12 ans, dans le cadre d'un cours d'histoire-géographie. Mais la situation s'est tendue avec trois policiers postés sur le parvis de la cathédrale Notre-Dame. Comme l'indique le communiqué, ces policiers étaient «en charge de la sécurité du lieu en vue de la venue de Monsieur le Préfet de Paris et "d'une personnalité"».

    Interrogé par BuzzFeed News, le CPE du collège, Echaniz Iñaki, explique que «les élèves étaient impressionnés par l'attirail des policiers, qui portaient des fusils d'assaut en bandoulière».

    Quelques élèves ont demandé si les armes étaient vraies, alors qu'un autre a pointé son doigt en forme de pistolet vers le ciel.

    Les policiers se sont alors adressés aux professeurs et leur ont dit qu'il fallait qu'ils «éduquent leurs élèves». L'un d'entre eux s'est énervé et, selon les enseignants du collège, s'en est pris à l'élève qui avait pointé ses doigts vers le ciel en tenant les propos suivants : «Je m'en bats les couilles que tu sois mineur, avec moi c'est direct au commissariat.»

    Les élèves ont continué leur visite, mais Echaniz Iñaki ainsi qu'un enseignant sont retournés voir les policiers. «On sait d'où ils viennent», a alors entendu le CPE dans la bouche d'un des policiers. Un commentaire formulé, selon lui, parce qu'une majorité d'élèves dans le groupe étaient noirs ou d'origine nord-africaine. Les policiers ont ajouté que les enseignants ne «savaient pas» de quoi leurs élèves «étaient capables».

    «Avec mon collègue, nous avons demandé à pouvoir voir le matricule [du policier qui a insulté les élèves]. Il a collé son fusil contre son matricule, en menaçant de nous embarquer», raconte le CPE à BuzzFeed News.

    «On a l’habitude de subir les regards des gens dans le métro et dans la rue. Mais de la part des représentants des forces de l’ordre, c’est inacceptable», dénonce-t-il. Les élèves «étaient béats qu’on puisse leur parler comme ça alors qu’on passe notre temps à leur dire qu’il faut se respecter et ne pas s’insulter».

    Echaniz Iñaki a saisi le jour même le Défenseur des droits au sujet de cet incident et dit avoir effectué un signalement en ligne auprès de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN), mais il n'a pas eu de réponse depuis.

    «Nous avons bien reçu cette saisine et nous allons instruire», a indiqué à BuzzFeed un porte-parole du Défenseur des droits.

    BuzzFeed News a contacté plusieurs syndicats d'enseignants de Seine-Saint-Denis (Snes, SUD), sans aucune réponse pour le moment.

    Le maire de Stains, Azzedine Taibi, a apporté son soutien sur Twitter aux collégiens et à leurs enseignants en dénonçant «avec la plus grande fermeté» un «comportement intolérable». Il ajoute que le policier «devra présenter ses excuses».

    Je tiens à apporter mon total soutien aux élèves et enseignants et à dénoncer par la plus grande fermeté, les propos inacceptables tenus par un agent de police. Il devra présenter ses excuses auprès des élèves et enseignants, tous choqués par ce comportement intolérable ! https://t.co/i5fWeXRNSi

    Contacté par BuzzFeed News, la préfecture de police de Paris indique qu'une «enquête interne a été diligentée dès que les faits ont été dénoncés» et ajoute qu'«il en sera tiré toutes les conséquences à l’issue de l’enquête». La préfecture n'a pas répondu sur le refus du policier de montrer son matricule, dont le port et la visibilité sont obligatoires.

    BuzzFeed News a également contacté l'IGPN pour confirmer le signalement de l'enseignant. Ni le service d'inspection de la police nationale ni le ministère de l'Intérieur n'ont répondu à nos sollicitations au moment de la publication de cet article.