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    48 choses à savoir sur les noirs à Paris

    D'hier à aujourd'hui, l'Histoire des noirs à Paris est riche.

    - Paris est historiquement connue pour compter un nombre important de personnes noires issues de l'immigration africaine ou qui viennent des DOM-TOM.

    - Si les statistiques ethniques sont interdites en France, on sait qu'environ deux tiers des Antillais de métropole sont installés en Île-de-France (chiffres de 2008).

    - Les Réunionnais, eux, vivent plus majoritairement en province. Selon l'INSEE, leur implantation est plus diversifiée sur l'ensemble du territoire.

    - À Paris, le quartier de la Goutte d'Or (Barbès, Château Rouge) compte un nombre important de personnes d'origine africaine.

    - En 1996, de nombreux «sans-papiers», notamment originaires du Mali, du Sénégal et de la Mauritanie ont occupé l'église Saint-Bernard (en plein quartier de la Goutte d'Or) pendant deux mois.

    - L'occupation a été soutenue par de nombreuses célébrités et des personnalités politiques de gauche.

    - Le 23 août 1996, les CRS ont procédé à l'évacuation de l'église à coups de hache.

    - De 1914 à 1918, 170.000 hommes originaires d'Afrique de l'Ouest ont combattu au sein de l'armée française en France et dans les Balkans.

    - On les appelle les «tirailleurs sénégalais» parce que c'est dans ce pays qu'ils ont formé le premier régiment de tirailleurs africains en 1857, mais cette expression fait en réalité référence à tous les soldats africains noirs qui combattirent pour la France lors des Première et Seconde Guerres mondiales.

    - Les tirailleurs sénégalais ont aidé à la Libération de Paris le 25 août 1944, mais ils ont longtemps été les grands absents des commémorations liées aux Première et Seconde Guerres mondiales.

    - S'il y a une ville qui a marqué les Afro-Américains, c'est bien Paris. C'est un Américain, W.E.B. Du Bois, qui fut le pionnier du panafricanisme (un mouvement de solidarité et de pensées entre les peuples africains) dont le premier congrès se tint à Paris en 1919.

    - En 1949, alors invité au Festival International de Jazz à Paris, Miles Davis tombe amoureux de la capitale et commence à côtoyer les intellectuels de Saint-Germain des Prés, qui lui vouent une très grande admiration.

    - Il passe notamment du temps avec Boris Vian, fervent amateur de jazz qui l'emmène lui, Duke Ellington et Charlie Parker dans les bars branchés du 6e avec ses amis Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir ou Juliette Gréco.

    - C'est lui qui présentera Miles Davis à Juliette Gréco, qui vivront ensuite une relation «passionnée» pendant quelques années.

    James Baldwin à Saint-Paul-de-Vence dans le sud de la France en 1979.

    - On peut également citer James Baldwin, une grande figure intellectuelle du mouvement des droits civiques qui s'est installé à Paris après la guerre.

    - Son homosexualité sera l'un des grands sujets de ses romans.

    - Pour raconter son arrivée à Paris, il disait: «Je ne suis pas allé à Paris, j'ai fui les États-Unis! Le 11 novembre 1948, j'ai débarqué sur le sol français avec quarante dollars en poche et une trouille monstre. Je ne connaissais pas un mot de français; je ne savais pas comment j'allais survivre. Mais j'étais certain que, quoi qu'il puisse m'arriver, ça ne pouvait pas être pire que ce qui risquait de m'arriver si j'étais resté aux États-Unis.»

    - C'est à Paris qu'il parviendra à vivre son homosexualité «librement» et à vivre de son art sans que ça ne soit un problème, jusqu'à ce qu'il soit confronté à un racisme frappant, notamment après la guerre d'Algérie.

    Josephine Baker au milieu des années 20.

    - Cependant, l'Américaine la plus parisienne reste Joséphine Baker, née en 1906 à Saint-Louis dans le Missouri et décédée en 1975 à Paris.

    - Elle est considérée comme la première star noire de Paris et devint l'emblème du music hall parisien, grâce à la Revue Nègre, à la fois scandaleuse et novatrice.

    - Celle qu'on appelait la «Vénus Noire» vouait un grand amour pour Paris qui n'était pas soumis à la ségrégation, contrairement à son pays d'origine.

    - Si elle a conquis la capitale avec son talent et son extraversion, c'est surtout à cause des clichés racistes qu'elle véhiculait malgré elle. Attachée de bananes, danses endiablées et poses lascives, elle représentait la figure de la femme exotique.

    À gauche, Joséphine Baker en 1940 qui s'inscrit en tant que volontaire pour la Résistance, et à droite, lors d'un gala Franco-Américain à Versailles en 1973.

    - En 1937, la star se marie avec un Français et prend la double nationalité.

    - En 1939, lorsque la guerre éclate, elle entre dans la Résistance comme espionne au sein du 2e Bureau et sous-lieutenante des forces féminines de l'armée de l'air, puis en cachant des maquisards dans son château des Milandes, dans le Périgord. Un engagement qui lui vaudra cinq médailles militaires.

    - Après la guerre, elle s'engage dans la lutte contre le racisme en soutenant le mouvement pour les droits civiques de Martin Luther King et la Lica en France (future Licra, Ligue contre le racisme et l'antisémitisme).

    - Elle transforme ensuite le village des Milandes en un village «du monde et la capitale de la fraternité universelle» en y installant 12 enfants de pays et religions différentes qu'elle a adoptés.

    - Depuis quelques années, de nombreuses personnes la citent dans les personnalités qui méritent d'avoir leur place au Panthéon.

    - La comparaison peut être faite avec Rafael Padilla, «Chocolat, le clown nègre», qui a connu un destin plus tragique que Joséphine Baker et qui fut le premier artiste noir de la scène française.

    - À l'affiche pendant quinze ans, les sketches qu'il jouait avec son comparse Footit reposaient sur les humiliations subies par le clown noir, qui suscitaient les fous rires des spectateurs.

    - Après avoir connu la gloire, il est mort dans l'indifférence totale en 1917 à Bordeaux.

    - L'histoire de Rafael Padilla a été adaptée au cinéma par Roshdy Zem, avec dans son rôle, l'acteur populaire Omar Sy.

    - Le Panthéon est le seul monument à Paris à faire une place importante à l'histoire coloniale.

    - À ce jour, le seul noir qui repose au Panthéon est Félix Éboué, administrateur colonial, résistant durant la Seconde Guerre mondiale et homme politique français. Il y fut inhumé le 20 mai 1949.

    - Il y a également Alexandre Dumas qui avait un père métisse, et Victor Schœlcher, militant pour l'abolition de l'esclavage dans les colonies françaises, qui y sont inhumés.

    - Mais d'autres personnalités importantes comme Toussaint Louverture (père de l'indépendance haïtienne) et Aimé Césaire (l'un des fondateurs de la négritude) y ont aussi leurs plaques commémoratives.

    - Le mouvement de la négritude se fonde à Paris, dans l'entre-deux-guerres, à l'initiative de trois jeunes intellectuels qui s'associent pour créer la revue l'Étudiant noir. Il y a le Sénégalais Léopold Sédar Senghor, le Guyanais Léon Gontran Damas et le Martiniquais Aimé Césaire.

    - Le mot négritude fut créé par Aimé Césaire, vers 1936. Il est employé dans un des premiers poèmes de Léopold Sédar Senghor, Le Portrait.

    - Césaire la définit ainsi: «La négritude est la simple reconnaissance du fait d'être noir, et l'acceptation de ce fait, de notre destin de noir, de notre histoire et de notre culture.»

    - L'inspiration venait du combat que menaient les Américains noirs aux États-Unis. Senghor comme Césaire se nourrissaient des œuvres des écrivains noirs Américains: W.E.B. Du Bois, Langston Hughes ou Claude Mac Kay qu'ils considéraient comme les véritables inventeurs de la négritude.

    - En plus d'un mouvement politique et intellectuel, c'était surtout un mouvement littéraire qui a propulsé la poésie noire dans les années 30.

    - Le mouvement de la négritude et son symbolisme fort qui a aidé les noirs à retrouver une fierté et à prendre leur destin en main est raconté dans Cahier d'un retour au pays natal, qui est aujourd'hui l'œuvre d'Aimé Césaire la plus lue et la plus traduite dans le monde.

    - Chez les femmes, on peut citer également Paulette Nardal, qui fut la première femme noire à étudier à la Sorbonne mais aussi l'une des instigatrices du mouvement féministe martiniquais.

    - Avec sa sœur Andrée, elle organisa un salon ouvert à tous, pour échanger sur «l'éveil de la conscience de race».

    - Christiane Taubira a été la première femme noire à se présenter à une élection présidentielle en France et à devenir ministre de la Justice.

    - Bessie Coleman était la première femme noire à pouvoir piloter en 1921 et c'est à Paris qu'elle a appris pendant deux mois les bases du pilotage.

    - Depuis quelques années, de nombreuses initiatives permettent d'en savoir plus sur l'histoire des noirs dans la capitale à travers des parcours dédiés.

    - Le Paris Noir, créé par Kévi Donat, permet une visite de la rive gauche et la rive droite de Paris. La première étant consacrée aux figures intellectuelles noires historiques qui ont façonné la capitale et la deuxième, plus contemporaine, consacrée aux diasporas africaines.

    - Little Africa Paris, créé par Jacqueline Ngo MPII, s'inscrit dans la même lignée, qui met en avant l'histoire de la présence africaine en France et notamment à Paris.

    Pour aller plus loin:

    - La France noire de Pascal Blanchard

    - La condition noire: Essai sur une minorité française de Pap Ndiaye