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    Identité des terroristes, mise en danger des otages: des journalistes poursuivis

    D'après nos informations, deux policiers, un journaliste et un consultant sont poursuivis pour avoir entravé l'enquête en diffusant l'identité des terroristes de Charlie Hebdo. L'enquête contre BFMTV est, elle, «toujours en cours».


    Mise à jour le 12 octobre: Pierre Martinet et Jean-paul Ney ont été condamnés à une amende de 3000 euros par le tribunal correctionnel de Paris ce mercredi, pour avoir diffusé les identités des auteurs de l'attentat contre Charlie Hebdo, lors de leur fuite en janvier 2015. Ils ont été déclarés coupables de recel de violation du secret de l'enquête. Les policières poursuivies pour l'envoi de ce cliché ont été relaxées.


    Un an après les attentats de janvier, le procureur de la République de Paris François Molins a rappelé ce vendredi sur France Inter que le parquet allait poursuivre l’hebdomadaire Valeurs actuelles après la publication d'extraits du procès-verbal d'audition d'un témoin clé des attentats du 13 novembre. C'est notamment grâce à cette personne que la piste d'Abdelhamid Abaaoud avait pu être remontée. «La diffusion de ces extraits a gravement mis en danger ce témoin», précisait le procureur.

    Jean-Paul Ney et Pierre Martinet poursuivis

    Mais François Molins a également précisé en fin d'interview qu'il comptait aussi poursuivre d'autres personnes:

    «Il y a des actions en cours. On est en train de poursuivre ceux qui sont à la base de la diffusion de la carte d’identité des frères Kouachi sur les réseaux sociaux».

    D'après nos informations, confirmées par le parquet antiterroriste de Paris, quatre personnes sont poursuivies. Le journaliste controversé Jean-Paul Ney, le consultant et ancien de la DGSE Pierre Martinet (dont la crédibilité est aussi discutée), ainsi que deux fonctionnaires de police. Si le parquet n'a pas pu «retrouver l'auteur de cette fuite», les quatre mis en cause devront répondre des accusations de «recel de violation du secret professionnel». Le parquet ayant la preuve que les fonctionnaires de police ont donné les documents aux deux consultants.

    «On vous tient enfants de putains»

    Après les attentats contre la rédaction de Charlie Hebdo, Jean-Paul Ney est en effet le premier à diffuser l'identité des deux terroristes sur Twitter. Il publie un document accompagné du message: «On vous tiens enfants de putains» (sic). En plus de l’identité des Kouachi (alors recherchés par la police), il divulgue le nom de Mourad H. 18 ans qui sera, pendant 24h, accusé à tort d'être complice des terroristes.

    Dans le même temps, Pierre Martinet, régulièrement invité par certains médias et présenté comme un ancien agent du Service action de la DGSE, diffuse ces documents sur son compte Facebook. «Le procès pourrait avoir lieu courant 2016, cet été peut-être», nous précise-t-on.

    L'avocat de Pierre Martinet nous a précisé vendredi soir que son client «n'a pas été mis en examen et n'a été destinataire d'aucune citation en justice».

    «Des journalistes leur ont demandé de photographier les morts»

    Par ailleurs, d'autres médias ont été critiqués pour leur traitement des attentats de janvier. Trois chaînes de télévision (TF1, France 2 et BFMTV) avaient ainsi révélé la présence dans l'imprimerie de Lilian Lepère, le salarié de Dammartin-en-goële qui s'était caché pendant des heures dans un meuble, sans que les Kouachi ne le découvrent. Alors qu'une enquête a été ouverte, l'avocat de Lilian Lepère, Antoine Casubolo Ferro, assure ce vendredi à Arrêt sur images, que seul son client a été entendu par la justice pour le moment.

    En avril dernier, plusieurs victimes de la prise d'otages de l'Hyper Cacher avaient également déposé plainte contre X pour «mise en danger de la vie d'autrui». La plainte vise les propos tenus à l'antenne par un journaliste de BFMTV, le 9 janvier dernier, alors qu'Amedy Coulibaly était encore retranché à l'intérieur du magasin.

    A 14 h 58, le spécialiste police-justice de BFMTV Dominique Rizet déclarait qu'une «personne, une femme, se serait cachée dès le début, dès l'arrivée de cet homme à l'intérieur du supermarché, (...) dans une chambre froide». La chaîne avait toutefois rapidement décidé de ne plus évoquer cette information.

    Plainte retirée ce vendredi après un accord financier

    D'après une source judiciaire contactée par BuzzFeed, certains anciens captifs d'Amedy Coulibaly ont également dénoncé avoir été «harcelés» par des journalistes qui les «appelaient sur leurs portables pendant la prise d'otages». Dans une lettre adressée à François Molins, l'un des ex-otages avait notamment accusé «des journalistes de leur avoir demandé de photographier les morts», tout juste tués par Coulibaly. De son côté, le parquet de Paris précisait ce matin «que l'enquête préliminaire était toujours en cours».

    Mais ce vendredi après-midi, les avocats de ces otages ont annoncé avoir retiré leur plainte après un accord avec la chaîne d'information. «Dans un souci d'apaisement, BFMTV souhaite réitérer ses plus vifs regrets pour avoir diffusé cette information qui a constitué une faute et aurait pu avoir des conséquences dramatiques pour la vie, l'intégrité et la sécurité des otages», déclarent la chaîne dans un communiqué commun avec les plaignants, transmis par leurs avocats, Me Patrick Klugman et Me Hervé Temime. La chaîne versera 60.000 euros au Fonds social juif unifié, pour le soutien des victimes de terrorisme.

    Mise à jour

    Ajout des déclarations de l'avocat de Pierre Martinet