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    Vin offert par Edouard Philippe : l'Intérieur assume le pari relevé par Gérard Collomb après une question sur les réfugiés

    Pour gagner une bouteille de vin offerte par le Premier ministre, le ministre de l'Intérieur devait placer une citation en latin. Il l'a fait en répondant à une question sur les conditions d'accueil «indignes» des demandeurs d'asile. Beauvau confirme et assume.

    Le 21 février dernier, pendant les Questions au gouvernement, le député En Marche Florent Boudié pose une question au ministre de l'Intérieur sur son projet de loi sur l'asile. Il lui demande notamment que la France accueille «plus dignement» les demandeurs d'asile. Gérard Collomb lui répond avec cette phrase en latin: «Amabam amare et amans amare quid amarem quaerebam.» L'ancien maire de Lyon cite Saint-Augustin («J’aimais aimer et, aimant aimer, je cherchais qui aimer») pour illustrer, selon lui, la «part d'humanité» qu'on a «en nous» et qui est «grande».

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    Vous pouvez retrouver toute la séquence sur le site de l'Assemblée ici.

    Le Premier ministre rigole franchement en voyant Gérard Collomb citer Saint-Augustin en latin.

    Et pour cause. Comme l'a révélé le JDD du 4 mars, cette phrase est le résultat d'un défi lancé par Edouard Philippe avec à la clé... une bouteille de vin rouge. Le soir même de cette allocution à l'Assemblée, le Premier ministre faisait en effet livrer une bouteille de Côte-Rôtie à l'hôte de la place Beauvau.

    «C'est un pari entre deux hommes de lettres», justifie Beauvau

    Contacté par BuzzFeed News, le cabinet de Gérard Collomb confirme et assume ce pari :

    «Ce pari, qui était celui de citer Saint-Augustin en latin, est un pari entre deux hommes de lettres et ne portait en aucun cas sur la loi asile et immigration. Le ministre, interrogé lors des questions au gouvernement a choisi de faire référence à un des plus grands théologiens chrétiens en référence à la tradition de charité du catholicisme depuis plus de deux millénaires», écrit son cabinet dans une réponse par mail.

    Interrogé sur d'éventuels autres «paris de ce genre» qui auraient pu être réalisés auparavant, le cabinet répond, amusé :

    «Le dernier pari en date du ministre avant celui-ci était celui de la victoire d’Emmanuel Macron à la présidence de la République !»

    À la question de savoir si la bouteille de vin provenait de la cave de Matignon, combien elle a coûté et si elle avait été livrée par un fonctionnaire, le cabinet de Gérard Collomb nous a renvoyé vers Matignon.

    Contacté, l'entourage d'Edouard Philippe assure que ce n'est pas le contribuable qui financé ce petit jeu, sans plus de détail :

    «Tout ce que je peux vous dire, c'est qu'il s'agit d'un cadeau que le Premier ministre a fait au ministre de l'Intérieur et qu'il a par conséquent réglé cela sur ses propres deniers», indique un porte-parole de Matignon.

    «Quel incroyable et inadmissible cynisme»

    Ce petit jeu en plein débat sur une loi évoquant le traitement des réfugiés n'a pas amusé tout le monde. «Pari cynique», «indécence du gouvernement», peut-on lire sur les réseaux sociaux. «Heureux de savoir qu'ils s'amusent, pendant que d'autres tentent de survivre», ajoute un autre internaute.

    Damien Carême, le maire de Grande-Synthe (ville qui accueille de nombreux réfugiés), a même demandé la démission du ministre de l'Intérieur et du Premier ministre.

    «Quel incroyable et inadmissible cynisme de la part du gouvernement ! Alors qu’ils vont infliger des traitements inhumains à des êtres qui ont tout perdu et laissé pour venir trouver refuge chez nous, ils "s’amusent" à parier une bouteille de vin ! #collombphilippedémission», écrivait-il le 4 mars dernier sur Twitter.

    «Si c'est avéré, ce comportement m'inspire beaucoup d'indécence, quand on sait ce qu'il se passe sur le terrain», dénonce auprès de BuzzFeed News, Jean-Claude Mas, secrétaire général de l'association d'aide aux migrants la Cimade. Et d'ajouter :

    «C'est cynique, et cela montre la toute-puissance d'un gouvernement qui développe des politiques technocratiques qui ne prennent pas en compte l'humain. Ce projet de loi n'a par ailleurs rien d'un projet d'humanité.»