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    Comment le combat de Maryvonne contre des squatteurs a été récupéré par l’extrême droite

    Depuis une semaine, la presse relaie l'histoire de Maryvonne, une vieille dame qui se bat pour récupérer son logement de Rennes occupé par des squatteurs. L'affaire a immédiatement été récupérée par l'extrême droite.

    Ils sont environ plus de 4000 à avoir «liké» la page Facebook de soutien à Maryvonne, cette dame de 83 ans qui se bat pour récupérer son pavillon squatté depuis 2013, rue de Châtillon, à Rennes. Ils veulent déloger les occupants et «défendre le droit à la propriété».

    La polémique est née le 30 avril dernier, lorsque Ouest France a rapporté l'histoire de cette octagénaire. Le journal résumait:

    Maryvonne a 83 ans, des jolis yeux bleus qui pétillent, et une terrible question: «Comment vais-je retrouver ma maison?» Elle a écrit à la maire de Rennes, au préfet, au procureur. La vieille dame ne peut plus rentrer chez elle. Depuis plus de dix-huit mois, des squatters occupent son pavillon, rue de Châtillon, à Rennes.

    Dès le lendemain, la presse nationale s'est emparée de l'histoire.

    Comme par exemple France 2, Le Parisien ou Le Figaro, sans apparemment avoir contacté la mairie ou la préfecture sur le sujet.

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    Et au même moment, l'extrême droite récupère l'histoire.

    Le milieu radical breton dénonce une loi notamment votée par l'UMP en 2007 et qui empêche l'expulsion immédiate de «squatteurs» 48h après l'occupation d'une habitation délaissée.

    Le site d'extrême droite Breizh-info (qui se propose de «ré-informer» la population) publie un article dès le 29 avril.

    Comme pour Ouest France, ce site assure que Maryvonne n'a jamais reçu de réponse de la mairie après avoir alerté de l'occupation de son logement. Il ajoute que la personne âgée, veuve, est dorénavant à la rue et relaie une pétition de protestation signée par 3603 personnes.

    L'histoire est en fait un peu plus complexe que ça.

    Dans un article publié ce jeudi, Le Monde démêle le vrai du faux en donnant la parole à tous les protagonistes. Le site rappelle ainsi que l'octagénaire n'avait pas initialement saisi la justice, contrairement à ce qui a pu être sous-entendu, et qu'elle n'est pas à la rue.

    Elle vit en effet toujours dans son ancienne résidence principale (chez son compagnon décédé). Contactée par BuzzFeed France, la mairie de Rennes précise aussi avoir proposé de reloger Maryvonne en attendant une décision de la justice qui examinera son cas le 22 mai prochain.

    Une manif' sensible finalement annulée.

    Vendredi, le parti d'extrême droite breton Adsav et des Bonnets Rouges prévoyaient de se rassembler devant le squat. Et la préfecture d'Ile-et-Vilaine confirmait à BuzzFeed France ne pas compter interdire cette manifestation. Mais en fin d'après-midi, la formation radicale a décidé de tout annuler après avoir appris la date d'audience fixée par la justice:

    Prenant acte de cette information, nous appelons nos sympathisants, manifestants ainsi que les membres du collectif de Soutien à Maryvonne à ne pas se rendre, vendredi matin, à 11h, devant le 94 rue de Châtillon, à Rennes (...) Nous appelons enfin nos compatriotes à se mobiliser également, dès à présent, pour le respect de la tradition Bretonne et Européenne, catholique, en défendant dès à présent la statue du Pape Jean-Paul II que des ligues gauchistes veulent déboulonner.

    Avant cette décision, ces militants s'étaient montrés violents.

    Lors du rassemblement organisé le 1er mai dernier par cette même organisation, de nombreux incidents ont eu lieu. Dans un long dossier publié ce jeudi, Carbreizh, un collectif antifasciste de Rennes, liste les individus proches de l'extrême droite qui défendent Maryvonne. Il rapporte aussi plusieurs dérapages:

    Sur le parcours, un homme, simple quidam, se fera molester.

    Le site de France 3 Bretagne ajoute que des Bonnets rouges ont «brisé un cadenas sur une des portes et cassé la vitre de l'autre».

    Sur la vidéo tournée par Ouest France, des militants tentent de pénétrer dans le squat.

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    L'avocate des squatteurs et la maire menacées.

    D'après le site carbreizh, l'avocate aurait aussi été menacée par un journaliste nommé Léopold Jimmy et ancien candidat FN aux cantonnales qui travaille pour l'agence LDC News: l'un des squatteurs a confirmé auprès de BuzzFeed France cette information.

    Après avoir interviewé Maître Peltier pour le compte de son agence et avoir coupé sa caméra, il lui demande: «Tu peux me donner ton adresse perso?» Surprise l'avocate décline. Ce à quoi il rétorque: «On va venir. On va venir chez toi quand tu seras pas là et tu verras ce que ça fait!»

    Sur la page Facebook d'Adsav, on peut aussi retrouver les coordonnées de l'avocate des squatteurs, Maître Stéphanie Peltier, accompagnées d'insultes:

    Enfin, la maire de Rennes est aussi victime d'une campagne de menaces et d'insultes et dit au Monde recevoir «des dizaines de mails à la teneur écœurante». Et ce, malgré la volonté exprimée par Maryvonne de ne pas voir son histoire récupérée.

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