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    «Islam hors de France»: récit d'une manifestation anti-immigration à Paris

    C'est le deuxième rassemblement islamophobe «non interdit» par la préfecture de police organisé par l'extrême droite à Paris depuis cet été. BuzzFeed France était sur place.

    Après les manifestations en soutien à l'accueil des réfugiés, certains partisans d'un tout autre discours ont tenu à donner de la voix jeudi soir dans le 16e arrondissement de Paris. Le partenaire du Front national, le Siel (souveraineté, indépendance et liberté), a en effet invité le gratin de l'extrême droite française pour s'opposer à ces «migrants venus d'Afrique noire, du Maghreb ou du Moyen-Orient {qui} submergent notre continent dans des proportions considérables».

    «Tous ensemble, nous devons nous opposer à l'arrivée programmée de populations étrangères indésirables, réclamer le démantèlement de l'espace Schengen et rétablir nos frontières territoriales», précisait le communiqué de Karim Ouchikh, président du Siel, avant la manifestation.

    Pour l'occasion, une petite scène avait été installée à la dernière minute à quelques mètres de l'ambassade d'Allemagne, symbole selon les six cents manifestants présents du «diktat imposé par Merkel à toute l'Europe».

    Au micro, plusieurs figures souverainistes se sont ainsi succédées:

    - La militante allemande du mouvement islamophobe Pegida Melanie Dittmer

    - L'écrivain Renaud Camus, condamné en appel en avril dernier pour provocation à la haine contre les musulmans

    - L'avocat Frédéric Pichon avocat de la manif' «Jour de Colère»

    - Le responsable à l'Action française Olivier Perceval

    - Le fondateur du site islamophobe Riposte Laïque Pierre Cassen

    - Le fondateur du site d'extrême droite Polemia Jean-Yves Le Gallou

    - Le président du Siel Karim Ouchikh qui a lu des messages de Béatrice Bourges et de Robert Ménard

    «Islam hors de France», «Faut tous les flinguer!»

    Pendant plus d'une heure trente, les militants ont repris en choeur différents slogans anti-immigration et parfois clairement islamophobes.

    - «Islam hors de France»

    - «On est chez nous»

    - «Islam hors d'Europe»

    - «La France aux Français»

    Avant qu'un manifestant ne lance cette phrase en parlant des musulmans présents sur le territoire:

    «Faut tous les flinguer!».

    Voir cette vidéo sur YouTube

    BuzzFeed France / Via youtube.com

    Mélanie Dittmer, représentante du mouvement allemand islamophobe Pegida, s'est ainsi exprimée pour dénoncer la politique migratoire avant de brûler un drapeau de l'Union européenne:

    «Un recours à la force sera inévitable»

    L'écrivain Renaud Camus, condamné pour incitation à la haine raciale en avril dernier, s'est auto-félicité en assurant que sa théorie complotiste «du grand remplacement est une réalité». Et d'ajouter:

    «L'antiracisme compte en finir avec l'Europe et sa civilisation».

    Après le discours du groupe royaliste Action française, l'ex-FN Jean-Yves Le Gallou a pris la parole et a lancé des appels. Il repris à son compte une citation de l'ancien ministre des Affaires étrangères Hubert Védrine:

    «Un recours à la force sera à un moment ou à un autre inévitable». Et de conclure:

    «Peuple d'Europe, levez-vous!».

    Après quelques allusions homophobes de Frédéric Pichon, déplorant que «l'Europe n'ait qu'à proposer la gay pride et Conchita Wurst», et la validation par le Siel de la théorie du «grand remplacement», le rassemblement s'est dispersé dans le calme vers 21h.

    Des manifs islamophobes, une exception parisienne?

    Sur Twitter, quelques internautes se sont étonnés que la préfecture de police de Paris n'ait pas interdit ce rassemblement ouvertement islamophobe. En effet, les sites ayant relayé cet appel, comme Fdesouche ou Action française, sont très explicites quant à leur motivation.

    Contactée avant ce rassemblement, la préfecture confirmait à BuzzFeed France «ne pas envisager d'interdire ce rassemblement», ajoutant que «la liberté de se rassembler reste la règle» et que «le trouble à l'ordre public n'était pas établi». Sur place, les CRS ont encadré la manifestation jusqu'à ce que les derniers manifestants quittent les lieux.

    Le site Riposte Laïque, pour qui la présence de «migrants mâles et musulmans victimes de pulsions naturelles» risque d'accroître les viols en France par exemple avait également organisé une manifestation du même genre en juillet dernier. Malgré de nombreux slogans condamnables par la loi lancés ce rassemblement, la préfecture de police avait décidé de ne pas l'empêcher.

    Pourtant, une manifestation «anti-islamistes» annoncée par Riposte Laïque (avec la présence de Pegida) en janvier dernier avait été interdite. Tout comme une autre manifestation «anti-immigration» prévue à Calais à la même époque.

    Contacté, le ministère de l'Intérieur ne «veut pas livrer de commentaires» et nous renvoie vers la préfecture, qui n'a pas souhaité nous répondre ce vendredi.

    S'agissant d'éventuelles poursuites juridiciaires, le service presse de SOS Racisme a affirmé ne pas être au courant de la tenue de ces deux manifestations. Le service juridique de la Licra était, lui, injoignable. Après publication de notre article, l'association a précisé sur Twitter que sa «commission juridique travaille sur cette affaire».

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