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    À la marche blanche, un militant de la LDJ chargé de protéger Gilbert Collard frappe un journaliste

    Une vidéo montre un militant de la Ligue de défense juive qui protégeait le député frontiste le 28 mars frapper un photographe. Ce dernier dit ne pas vouloir porter plainte.

    Des milliers de personnes ont participé à une marche blanche à Paris le 28 mars pour rendre hommage à Mireille Knoll, une octogénaire juive tuée cinq jours plus tôt à Paris, et pour protester contre l'antisémitisme en France. Cette marche a été émaillée par quelques incidents aux abords des délégations du Front national (FN) et de la France insoumise. Dans une vidéo que BuzzFeed News a obtenue, un militant de la Ligue de défense juive (LDJ) — un groupuscule «d’autodéfense» juif habitué des actions violentes – qui protégeait le député FN Gilbert Collard a été filmé en train de frapper un photographe.

    video-player.buzzfeed.com


    Voici un résumé de la scène :

    Qui est cet homme en blouson de cuir qui frappe un photographe sans raison ? Dans une séquence filmée par LCI peu avant l'agression, Gilbert Collard donne une partie de la réponse. Il présente les personnes qui l'entourent comme «des amis juifs» qui «assurent» sa «protection». À sa gauche, il y a l'homme qui a frappé le photographe, habillé d'une veste noire et d'une capuche grise. Sur d'autres plans, il apparaît le visage masqué.

    À plusieurs reprises, sur plusieurs vidéos, on voit d'ailleurs distinctement l'homme qui a agressé le photographe protéger Gilbert Collard pendant la marche blanche.

    On le voit ici, à un autre moment de la marche, assurer la protection de Gilbert Collard, aux cotés de plusieurs responsables du FN.

    Nous avons retrouvé l'identité de cet homme. Il s'agit d'un membre de la LDJ, présenté il y a quelques années sur l'un des sites internet de la Ligue comme un pilier de ce groupuscule. Contacté par BuzzFeed News, il s'est contenté de reconnaître qu'il a protégé Gilbert Collard le 28 mars et que, à un autre moment de la marche, il s'est interposé entre la délégation de Jean-Luc Mélenchon et des manifestants qui en voulaient au leader le France insoumise, comme en atteste une vidéo que BuzzFeed a consulté. Il n'a pas donné plus de détails.

    Le photographe a aussi été molesté par des CRS

    Contacté par BuzzFeed News, le photographe indépendant qui a été frappé confirme l'agression :

    «Il y avait une grosse bousculade puis cet homme m'a repoussé et il a voulu me porter un coup, mais je n'ai pas été blessé. Sur le moment, je n'ai pas su si c'était un policier ou le service d'ordre du FN», témoigne-t-il sous couvert d'anonymat.

    Le photographe dit ne pas vouloir porter plainte et explique que les rapports entre les journalistes et le service d'ordre ont été très tendus pendant la manifestation : «C'était très chaud. Les journalistes se faisaient insulter par les militants ou le service d'ordre». Cette marche a été particulièrement pénible pour ce photographe qui raconte qu'à un autre moment de la marche, alors qu'il prenait des photos aux abords de la délégation du FN emmenée par Marine Le Pen, il a été jeté au sol par des CRS : «l'un d'eux m'a même braqué avec une mitraillette pour me demander de partir», raconte-t-il à BuzzFeed News. Des confrères du journaliste ont dû intervenir. Cette scène, plutôt brutale, a été filmée.

    [VIDEO] Lors de la marche blanche pour Mireille Knoll et alors qu'il protégeait le "défilé de Marine Le Pen" : un CRS a braqué son fusil mitrailleur sur la foule, en menaçant d'en faire l'usage. Son collègue l'a retenu vivement... Video : @Ismael_ElHajri https://t.co/kbHyFcoQjT

    «S'ils sont de la LDJ bravo, chapeau, car vraiment ils nous ont bien protégés.» — Gilbert Collard

    Contacté par BuzzFeed News, Gilbert Collard dit ne pas être «au courant de cette histoire» de coup de poing administré par un de ses «amis» à un photographe: «Je n'ai pas vu cette scène. Si un journaliste a reçu un coup de poing, je le regrette. Ce n'est pas normal», dit-il.

    Interrogé sur le profil des gens qui ont assuré sa sécurité lors de la marche, il dit :

    «Ce sont des amis, dans le sens où ce sont des gens qui témoignent de l'amitié. J'ai fait la connaissance de ces personnes qui m'accompagnaient sur le moment et ils ont eu un comportement on ne peut plus amical avec moi puisqu'ils ont évité que je reçoive des coups, ils ont détourné un parapluie de mon visage. Moi, je suis couvert de bleus. J'ai l'arcade abîmée. Ce sont ces jeunes gens qui m'ont protégé.»

    Quand on lui précise que l'homme qui le protégeait et qui a porté un coup au photographe est militant de la LDJ, il répond :

    «Il y avait des CRS, des gens du service d'ordre du FN, et il y avait des gens qui étaient pour moi des membres du service d'ordre de la manifestation. Mais s'ils sont de la LDJ, bravo, chapeau car vraiment ils nous ont bien protégé. (...) Vous allez me reprocher de ne pas m'être laissé piétiner sur place. Et de ne pas avoir demandé leur papiers d'identité aux gens qui venaient me porter secours. Bravo, bravo, vraiment bravo... Vous m'imaginez dans une manif ou on est bousculé, où on prend des coups dire au type à coté de moi "vous appartenez à quelle organisation, vous avez un certificat de bonne moralité?"».

    Groupe interdit en Israël et aux États-Unis

    Cette position de Gilbert Collard vis-à-vis du groupe, interdit aux États-Unis et en Israël, n'est pas singulière au FN. En 2014, alors que le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve envisageait la possibilité d'une dissolution de la LDJ, Marine Le Pen les avait soutenus. «S'il existe une Ligue de défense juive, c'est qu'il y a un grand nombre de juifs qui se sentent en insécurité», disait-elle.

    Le groupuscule est toutefois régulièrement critiqué par une large partie de la classe politique qui lui reproche ses actions violentes. Deux sympathisants de la LDJ ont par exemple été condamnés en juin 2014 à Versailles à de la prison ferme pour avoir visé en 2012 avec une bombe artisanale la voiture d’un jeune de confession juive qui avait critiqué la politique israélienne sur son blog. Ils avaient déjà agressé un journaliste, cette-fois de BuzzFeed, lors d'une manifestation en 2015. Dans un communiqué, la France insoumise a demandé le 28 mars «que soit mis un terme» aux activités de la LDJ.