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    Jean-Christophe Cambadelis à BuzzFeed: «La question de Manuel Valls au PS ne se posera plus dans quelques semaines»

    En pleine tempête, le PS aborde les prochaines législatives en serrant les dents. Chez BuzzFeed, le patron du parti Jean-Christophe Cambadelis évoque l'échec de la présidentielle, les trahisons des uns et des autres, et l'avenir de son parti à l'orée d'une déroute historique.

    Le PS est à la dérive, mais son patron, Jean-Christophe Cambadelis, tente tant bien que mal de tenir la baraque. À quelques jours d'un premier tour aux allures de chemin de croix pour les candidats socialistes, le député de Paris et lui-même candidat à sa réélection dresse le portrait d'une gauche morcelée mais pas (encore) abattue. Au passage, il allume Manuel Valls et Marisol Touraine, coupables d'avoir rejoint Emmanuel Macron dans son entreprise de démolition du PS.

    Les projections sont plutôt catastrophiques pour le PS, est-ce que votre parti est mort?

    Les projections nous donnent entre 20 et 30 députés, et entre 10 et 15 pour la France insoumise. Ce qui veut dire que dans le meilleur des cas, l’ensemble de la gauche fera entre 25 et 40 parlementaires. Si c’était ça, ce serait un recul historique de l’ensemble de la gauche. Et dans cet ensemble, le PS aurait subi une défaite parlementaire. Il faudra en tirer toutes les conséquences et analyser les raisons qui nous ont mené là.

    Avec combien de députés PS considérez-vous que ces législatives n’auront pas été un échec?

    Un chiffre qui permet d’être au-delà d’un groupe. Les sondages nous donnent une trentaine de députés, on n’a pas vu ça depuis la fondation de la Ve République. On va pas mentir aux gens. Si je vous disais qu’on allait faire une centaine de députés, vous exploseriez de rire. Prenez mon cas, si je suis au deuxième tour, j’ai des chances de l’emporter.

    Un groupe c’est 15 députés. À 15 députés, vous considérez que ce n'est pas un échec?

    À partir du moment où nous pouvons peser à l’Assemblée nationale. 15, 25, 30, 35. Personnellement, je pense que nous allons faire mentir les sondages.

    Vous envisagez la possibilité d’avoir moins de 15 députés?

    Non. Je pense que le PS aura un groupe, je l’espère le plus important possible. Si vous me demandez un pronostic, je nous vois plus près des 50 parlementaires que des cinq.

    «Manuel Valls a décidé de ne plus être au PS, donc la question ne se posera plus dans quelques semaines»

    Pourquoi n'avez-vous pas sanctionné Marisol Touraine et Myriam El Khomri, qui s’affichent avec la majorité présidentielle sur leurs affiches de campagne?

    Je ne les mets pas sur le même plan. Myriam El Khomri dit «majorité présidentielle» mais elle affiche le poing et la rose du PS sur son affiche, ce qui n’est pas le cas de Marisol Touraine. On a fait une circulaire envoyée à l’ensemble des fédérations. Nous, ce n’est pas comme chez En marche ou chez La France insoumise, ce n’est pas le chef qui décide. On a des fédérations, on a des instances, c’est très démocratique. C’est eux qui ont pris la décision de soutenir la candidate écologiste (Marie-Agnès Peltier, ndlr) plutôt que Marisol Touraine.

    Qu’est-ce que ça vous fait de voir Manuel Valls, un ancien Premier ministre socialiste, en très mauvaise posture dans sa circonscription?

    C'est étonnant, mais il est loin d’avoir perdu. Il n’a pas de candidat En marche face à lui, il n'a qu'une candidate de la France insoumise. On peut penser qu’il peut l’emporter. Mais il est dans la difficulté, non pas à cause de l’action menée par les socialistes, mais par rapport à ce qu’il a fait et dit. Il a dit qu’il ne soutenait pas Benoît Hamon.

    Vous pensez vraiment que c’est ça qui explique sa difficulté?

    Dans sa circonscription, c’est surtout ça je crois.

    Vous ne pensez pas que les gens ont du mal à voir la différence entre un Manuel Valls et un Alain Juppé?

    Je crois qu’il y a une différence entre les deux, mais ce sera à lui de le dire.

    En attendant, Manuel Valls est exclu du Parti socialiste ou pas encore?

    Valls est devant la commission des conflits. Je crois qu’il a décidé de ne plus être au PS, donc la question ne se posera plus dans quelques semaines. Il dit qu’il reste de gauche, mais l’idée de revenir dans un congrès du PS ne lui traverse pas l’esprit, c’est lui qui le dit.

    «J’ai essayé de contenir les frondeurs, puis les opposants aux frondeurs devenus frondeurs eux-mêmes»

    Au rayon des investitures surprenantes, il y a Jérôme Lambert. Pourquoi le PS l'a investi alors qu'il a voté contre le mariage pour tous et s'est déclaré proche de La Manif pour tous?

    Parce que c’est un candidat investi par le PRG. Ce n’est pas notre candidat. On a un accord avec le PRG sur un certain nombre de circonscriptions. C’est une question qu’il faudrait poser au PRG, même s’il y a très très très longtemps il était socialiste.

    Il figure quand même sur le site du parti socialiste

    Oui mais nous ne pouvons pas dire à nos partenaires, c’est malheureux mais c’est comme ça, que nous refusons leur candidat, c’est un accord national.

    Vous le regrettez personnellement?

    Oui, je le regrette. En plus, Jérôme Lambert, je le connais depuis très longtemps, il fut un temps où il était président de l’association des motards, il était moins à droite qu’aujourd’hui. Je regrette qu’il puisse penser qu’il est de gauche alors qu’il n’a pas voté cette loi.

    Quelle responsabilité portez-vous dans l’échec du PS et de Benoît Hamon?

    Je ne suis pas responsable de tout. C’est difficile d’installer un parti dominant majoritaire et de masse quand il est contesté, ou dans la rue ou dans les médias. Être le parti de la République quand il fait 4 ou 5% dans les sondages, ce n’est pas facile. Mais moi j’ai une part de responsabilité. J’ai essayé de maintenir tout le monde dans un cadre. J’ai essayé de faire tomber les tensions, que tout le monde se regroupe. J’ai essayé de contenir les frondeurs, puis les opposants aux frondeurs devenus frondeurs eux-mêmes.

    Si le PS a une majorité absolue aux législatives, qui sera le Premier ministre de cohabitation?

    Bah moi (rires). Non, je ne pense pas que ce soit raisonnable de faire de la politique fiction comme ça. Aujourd’hui, le PS n’est pas en capacité d’organiser une majorité. Par contre, nous sommes en capacité de représenter nos concitoyens. Nous avons un désaccord sur la loi travail, sur la CSG, sur les fonctionnaires, sur l’école. Il est bon que le Parlement ait des voix qui permettent d’avancer, sinon il ne servira à rien.