Si vous ne connaissez pas le nom d'Aydian Dowling, vous vous souviendrez peut-être de cette photo qui a pratiquement cassé Internet en début d'année:
Après le buzz créé par cette image, Aydian Dowling a rejoint la compétition «Ultimate Guy Search» du magazine Men's Health dans l'espoir de devenir le premier homme transgenre à en faire la couverture.
En plus d'être connu pour sa célèbre chaîne YouTube, Aydian est le fondateur de la ligne de vêtements Point5cc, qui aspire à «souligner les points communs entre trans et créer un sentiment de fierté». Son épouse, Jenilee Dowling, est aussi fortement impliquée dans cette marque de vêtements.
Point5cc fait don d'une partie de ses bénéfices à un fond annuel pour les opérations chirurgicales de réattribution sexuelle. Ça paraît logique, quand on sait qu'à l'origine, Aydian Dowling a commencé à imprimer des t-shirts pour payer sa propre intervention chirurgicale.
Aux États-Unis, «Ultimate Guy Search» est une compétition nationale pour «les personnes possédant toutes les qualités façonnant l'homme d'aujourd'hui, équilibré, actif, soucieux de sa santé et réfléchi». Le vainqueur, sélectionné par un jury, se retrouvera en couverture et dans un article du numéro de novembre 2015.
L'homme de 27 ans a rendu visite à BuzzFeed pour discuter de la compétition (il est actuellement en tête de la partie «choix des lecteurs» avec plus de 43.000 votes d'avance), et bien-sûr, pour recréer quelques photos emblématiques d'hommes bien montés.
Lorsque la recréation de la photo d'Adam Levine a explosé en ligne, comment avez-vous réagi?
«On savait que ce ne serait qu'une promotion [pour la couverture], alors nous avons pensé qu'elle ne serait vue que dans notre communauté. J'avais un peu d'audience sur YouTube, donc on savait qu'elle allait être partagée et que les gens l'apprécieraient. [...] Les gens ont continué à la partager encore et encore. C'est devenu Saviez-vous qu'elle a été vue 110.000 fois au cours de la dernière heure? Et avant de pouvoir réaliser ce qu'il se passait, c'était 250.000, et puis untel la tweetait, et untel la partageait, et un autre voulait fait un article dessus. C'était complètement fou, je n'aurais jamais imaginé que les choses prennent de telles proportions.»
Que signifierait pour vous le fait de remporter cette compétition?
«Le but était d'être au top du classement pour sensibiliser les gens. C'était l'objectif initial: faire une déclaration, avoir un homme transgenre sur la couverture. C'était juste cela! Mettre un homme trans en couverture de Men's Health. J'ai fait une vidéo à ce propos sur ma chaîne YouTube et elle a été partagée. Quelques heures après avoir fait cette vidéo, j'étais le numéro un [du classement] de la compétition.
J'ai l'impression que la communauté transgenre dans son ensemble et moi-même personnellement avons les mêmes sentiments. Cela apporte de la visibilité et sensibilise les gens. Autrefois, j'étais l'un de ces enfants dépressifs, et il n'y avait personne pour me servir de modèle. Même pas quelqu'un avec un style de vie différent et étant heureux d'une façon ou d'une autre — pas quelqu'un de riche ou célèbre, simplement heureux. C'est tout ce qu'on veut, quand on est enfant. [Apparaître sur la couverture] signifierait qu'il y a cette nouvelle génération pour dire "Hé, je peux vivre un vie heureuse, je peux réussir, je ne suis pas aussi bizarre que je le pensais." On veut juste ressentir l'esprit de communauté, un sentiment de respect, de reconnaissance, d'être entendu, d'avoir une place autour de la table.»
Imaginons que vous gagniez et apparaissiez en couverture. Qu'espérez-vous que les enfants trans ressentent lorsqu'ils la verront?
«Je ne veux pas qu'ils pensent que pour être un homme, pour être quelqu'un de bien, il faut être affiché sur la couverture d'un magazine, et que c'est la seule façon de réussir dans la vie. C'est plus le fait de voir un autre homme trans le faire — s'exposer aux autres. Ils se diront, "Hé, moi aussi je pourrais le faire."
Si un jeune enfant voit un homme trans en couverture de ce magazine et s'identifie comme trans, il peut dire: "Hé, je peux exister." Ce sont ces petites choses qui inspirent les gens à faire quelque chose. J'ai vraiment l'impression que si j'avais vu cela et connu le mot "transgenre" lorsque j'avais 12 ou 13 ans, je me serais peut-être identifié à cela plus tôt. Peut-être aurais-je eu une vie différente? C'est quand on est au courant de quelque chose, que l'on peut vraiment le faire, que cela devient possible.»
Avez-vous eu des modèles en grandissant?
«Je suis entré en contact avec des gens en ligne, et il y avait une petite communauté sur YouTube. [...] Je n'avais aucun ami trans dans la vraie vie. Je voulais simplement me sentir, je ne veux pas dire "intégré" parce que je n'ai pas changé pour m'intégrer, mais je voulais trouver la porte la plus facile à ouvrir pour moi. Oh, voila des gens qui m'aiment comme je suis parce qu'ils sont exactement comme moi! Alors je suis entré en contact avec des gens en ligne et c'est là que j'ai construit toute ma communauté.»
Nous avons récemment demandé à quelques athlètes trans comment l'exercice physique avait changé leur vie; comment cela a-t-il affecté la votre?
«J'ai commencé à faire de l'exercice avant même de débuter la prise d'hormones, parce que je savais qu'en allant à la salle de sport, je pourrais essayer de rendre mon corps plus masculin. Je pourrais prendre du muscle, avoir des épaules plus larges et me débarrasser de mes hanches féminines. Lorsque vous êtes dans une salle de sport, vous êtes face à un miroir une heure par jour, et cela vous oblige à reconnaître votre corps — même si vous ne l'aimez pas. Beaucoup de gens ne le font pas parce que le miroir les intimide, ils ne veulent pas savoir. C'était le moment de me forcer à être face au miroir, et on observe littéralement son corps évoluer. J'ai commencé à créer un lien avec mon corps que je n'avais jamais eu auparavant. Et même si [mon corps] n'était pas beau ni parfait, lorsqu'il a commencé à se transformer en un corps plus masculin, je me suis dit Tu y es. Il n'y a rien de mieux que de se regarder dans le miroir et dire "C'est moi".
Il faut avoir du respect pour soi-même, et c'est vraiment difficile de développer ce respect lorsque vous êtes trans, parce que vous ne vous identifiez généralement pas à la moindre partie du corps dans lequel vous êtes à cet instant. Pour moi, l'exercice physique et le traitement hormonal de substitution ont été une façon de mieux me sentir dans mon corps.»
Nous n'avons pas pu résister à une recréation de plus. Il n'y a pas de quoi.
