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    Fabius a évoqué pour la première fois l'affaire Ulcan avec Netanyahu

    D'après nos informations, Laurent Fabius a pour la première fois évoqué cette affaire avec le Premier ministre israélien. Mais le gouvernement français ne souhaite toujours pas s'exprimer publiquement sur les attaques du hacker israélien Ulcan contre la presse.

    Le hacker israélien Ulcan, alias Gregory Chelli, fait de nouveau parler de lui. Il y a un an, le jeune homme harcelait la rédaction de Rue89 en s'en prenant à son directeur de publication Pierre Haski, et au journaliste Benoît Le Corre, dont le père est décédé quelques jours après toutes ces attaques.

    Ulcan use systématiquement des mêmes méthodes: paralyser les sites d'information grâce à une attaque informatique et pratiquer le «swatting», un acte qui consiste à envoyer les forces d'intervention de la police chez les victimes.

    La semaine dernière, trois patrons de presse ont été victimes de ces mêmes agissements.

    En effet, de nombreux policiers ont débarqué chez Pierre Haski, Daniel Schneidermann (patron du site Arrêt sur Images) et Denis Sieffert (directeur de la rédaction de Politis). Dans les trois cas, une source anonyme avait annoncé aux forces de l'ordre que ces trois hommes avaient tué leur compagne. Et les trois victimes semblent convaincues, preuves à l'appui, que le coupable est encore Ulcan.

    Mais si la liste des cibles du hacker ne cesse de se rallonger depuis l'été 2014, le gouvernement français n'a jamais voulu prendre position publiquement contre ces actes.

    Contactée par BuzzFeed France, une source au ministère des Affaires étrangères assure malgré tout que Laurent Fabius «suit le dossier de près depuis le début». Et ajoute qu'il a pour la première fois évoqué le sujet avec le Premier ministre israélien:

    «Le ministre s'est rendu en Israël dimanche et a évoqué cette affaire Ulcan avec Benyamin Netanyahou. Je peux vous dire que la coopération judiciaire entre nos deux pays est de qualité. Je n'ai pas le fond du contenu des discussions, mais je sais que Netanyahou a eu une attitude ouverte dans un état d'esprit positif».

    Mais pourquoi le ministre des Affaires étrangères ne s'est-il jamais exprimé publiquement sur cette affaire?

    «C'est faux, le ministre avait dit quelque chose en octobre 2014».

    En réalité, Laurent Fabius ne s'était pas exprimé en octobre 2014. Il s'agissait d'un membre du cabinet au Quai d'Orsay qui déclarait à metronews que prendre position serait dépasser un stade sur l'échelle diplomatique:

    «Il n'a encore jamais été questionné publiquement sur ce hacker. Mais prendre position ce serait déjà un cran supérieur. Nous privilégions d'abord le travail diplomatique (...) Je ne vous cache pas que nous sommes tous très choqués par les actions de cet individu».

    En dehors de cette déclaration informelle, le gouvernement a totalement esquivé le sujet.

    D'ailleurs, selon nos informations, Laurent Fabius ne souhaite toujours pas publier de communiqué de presse sur le sujet, ni soutenir plus explicitement les rédactions visées. Une position que ne se prive pas de critiquer Pierre Haski sur Rue89:

    «Plusieurs ministres se sont rendus au « chevet » de TV5 Monde lorsque cette station francophone a subi une attaque informatique au printemps dernier ; mais le gouvernement n'a toujours pas dit publiquement un mot sur les activités de ce hacker qui fait tomber des sites et harcèle pêle-mêle journalistes, militants politiques ou associatifs, personnalités politiques comme Martine Aubry, ou patrons comme Stéphane Richard.

    Les autorités israéliennes, pour leur part, tout en affirmant leur disponibilité à aider la justice française, n'ont pas non plus levé le petit doigt pour faire cesser ces agissements. S'il s'était agi d'une situation inversée – un hacker en France, agissant à visage découvert, harcelant des Israéliens –, gageons que le problème aurait été réglé en l'espace de quelques jours...»

    Une enquête criminelle est toujours en cours. Elle a été ouverte en octobre 2014 pour «violences volontaires avec préméditation», «dénonciation de crimes et délits imaginaires», «usage de données d'identification d'autrui en vue de porter atteinte à sa tranquillité ou son honneur» et «détention et diffusion de documents portant atteinte à l'intimité de la vie privée», pour les actes commis contre les journalistes de Rue89.

    Et si aucun mandat d'arrêt international n'a été délivré à ce jour contre le hacker, l'ambassade israélienne assure à BuzzFeed France qu'il existe «une étroite collaboration entre les deux pays». «Jusqu'à présent, toutes les demandes du ministère de la Justice français ont été traitées rapidement par l'État d'Israël», ajoute-t-elle.

    Également sollicités par BuzzFeed France, ni le ministère de la Justice, ni le ministère de l'Intérieur (qui doit recevoir les trois journalistes victimes de swatting mardi), n'ont donné suite à nos appels.

    Après la publication de notre article, le compte Facebook d'Ulcan a été suspendu. Laurent Fabius s'est également exprimé publiquement sur cette affaire après avoir été interrogé par des journalistes au Caire, comme le révèle sur Twitter le journaliste de RFI François Hume-Ferkatadji:

    w.soundcloud.com

    Cet article est signé BuzzFeed News parce qu'Ulcan cible les journalistes personnellement.

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